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Somme. Elle est étendue comme une barrière d’Ouest en Est, entre Amiens et Péronne. Puis à six lieues environ dans le Sud-Est de Péronne, en amont de Ham, elle est continuée par le canal Crozat jusqu’à l’Oise, à peu près à la hauteur de La Fère.

Cette ligne Amiens-La Fère apparaît d’une manière très différente, suivant que l’envahisseur vient du Nord ou vient de l’Est. Pour celui qui vient du Nord, elle est la dernière barrière à forcer avant le camp retranché de Paris. C’est là qu’en 1712 Louis XIV veut, en cas de revers, mourir avec sa dernière armée, ou sauver l’Etat. C’est par-là qu’après Waterloo le flot des alliés descend sur la France, Blücher par Saint-Quentin, Wellington par Cambrai et Péronne. La Somme fut passée entre Bray et Ham.

A un envahisseur qui vient de l’Est, et qui est maître de l’Oise, la conquête de la ligne de la Somme donne le débouché sur Rouen, qui permet d’envelopper Paris par l’Ouest. C’est dans cette direction que les Allemands se présentèrent en 1870. Une grande ligne ferrée circulaire entoure Paris par Reims, Laon, La Fère, Amiens et Rouen. Cette ligne était capitale pour les Allemands : dès le milieu de novembre (ils avaient déjà Reims et Laon), Moltke ordonnait à Manteuffel de prendre Amiens comme objectif. Manteuffel attaqua du Sud-Est, en venant de la région de Roye-Montdidier. Le 27 novembre, il entrait à Amiens. De là il filait sur Rouen, qui était occupé quelques jours plus tard. La voie circulaire autour de Paris était entièrement aux mains de l’ennemi.


IX

Au début de 1916, les forces britanniques en France, par un accroissement continu, se sont étendues au Sud jusqu’à la Somme, libérant notre 10e armée, qui a pu être envoyée ailleurs, et se mettant en liaison avec la gauche de la 6e. — De son côté, quelles forces l’ennemi a-t-il rassemblées ? Nous avons dit qu’elles se composaient de trois armées. Comme les armées françaises qui leur faisaient face, ces armées sont venues, après la bataille de la Marne, prolonger progressivement le dispositif depuis l’Oise jusqu’à la mer. Et, toujours comme les armées françaises, elles sont venues se souder l’une à l’autre en s’étendant de plus en plus vers le Nord,