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le capturé ne saurait directement demander au Conseil des prises de lui accorder une indemnité. Car le Conseil ne peut être saisi que par le ministre, et pour une prise dont celui-ci poursuit la confirmation.

Telles étaient les attributions, — en quelque sorte classiques, — du Conseil des prises, lorsque, au cours de la présente guerre, le décret du 13 mars 1915 est venu lui en donner une nouvelle. Le gouvernement allemand avait déclaré les eaux de la Manche (nous citons maintenant les termes du rapport qui précède ce décret) « zone militaire dans laquelle tous les navires marchands alliés seraient détruits sans égard pour la vie des équipages et des passagers non combattans, et dans laquelle la navigation neutre serait exposée aux mêmes dangers. » En réponse, l’Angleterre et la France se mirent d’accord pour « empêcher toutes espèces de marchandises d’atteindre ou de quitter l’Allemagne, toutefois… sans aucun risque pour les navires neutres ou pour la vie des personnes. » Le décret du 13 mars décida donc que nos croiseurs arrêteraient en mer les marchandises appartenant à des sujets allemands, ou venant d’Allemagne, ou expédiées sur l’Allemagne. Les marchandises ainsi saisies sont débarquées dans un port français. L’État français ne prétend point les capturer pour son compte, mais il les empêche d’arriver à leur destination, pour entraver le commerce allemand. Si elles appartiennent à des sujets allemands, elles sont vendues, et le prix en est consigné jusqu’à la signature de la paix. Si elles appartiennent à des neutres, elles peuvent leur être restituées. Le Conseil des prises est chargé de statuer sur leur sort. En lui confiant cette tâche nouvelle, le gouvernement a sans doute pensé que son intervention était de nature à rassurer les neutres contre toute crainte d’arbitraire.


iv

Pour qu’il puisse remplir utilement la mission qui lui incombe et qui vient d’être définie, le Conseil des prises doit renfermer des élémens assez variés. En vertu du décret du 9 mai 1859, il a un conseiller d’État pour président et comprend en outre six membres, dont deux choisis parmi les maîtres des