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1901 il s’était négocié 192 millions d’actions au cours de la même période : mais nous sommes loin de ces époques de spéculation à outrance. Le nombre des faillites en juillet a légèrement dépassé celui de 1914 ; toutefois, le total du passif reste inférieur au chiffre de l’an dernier. Il faut d’ailleurs reconnaître que l’activité industrielle est surtout due aux commandes de guerre, accordées souvent à des fabricans dont ce n’est pas la spécialité et qui ont transformé leur outillage en vue de travaux avec lesquels ils ne sont pas familiers. La hausse violente qui pousse les cours des actions de certaines entreprises est dangereuse et prépare sans doute à la Bourse de cruels réveils : un publiciste autorisé de Wall Street compare le mouvement actuel à un tourbillon destiné à engloutir les cliens et les intermédiaires imprudens.

Le résultat de l’énorme excédent des exportations a été de renverser la position des changes étrangers. Alors qu’au cours du second semestre de 1914, le dollar était déprécié par rapport au franc et à la livre sterling, c’est le phénomène contraire qui s’est manifesté cet été. Le dollar n’a cessé de monter : il a valu près de 6 francs de notre monnaie, c’est-à-dire qu’il a été coté à environ 15 pour 100 de prime. Alors qu’il y a douze mois, les notabilités financières américaines se réunissaient pour rechercher les mesures propres à rétablir l’équilibre et à payer les dettes américaines en Europe sans exporter de trop grandes quantités d’or, c’est notre ministre des Finances et le chancelier de l’Echiquier qui confèrent pour étudier le problème des remises à faire par la France et l’Angleterre aux Etats-Unis. Des délégations de banquiers français et britanniques ont traversé l’Océan pour résoudre la difficulté sur place. Bien que nous soyons préparés, ainsi que nos alliés, à expédier de l’autre côté de l’Atlantique des sommes très importantes de mêlai jaune (on parle de 2 à 3 milliards de francs) pour solder nos achats, il est évident que ceux-ci ne se maintiendront à la même échelle, que s’ils se règlent, en partie tout au moins, au moyen d’ouvertures de crédit consenties par les Etats-Unis ; en d’autres termes, il faut que les Américains se décident à souscrire des obligations du Trésor anglais et français, s’ils veulent continuer à nous vendre leurs produits. Nous ne doutons pas d’ailleurs que de toute façon l’équilibre se rétablisse ; l’arrivée de quantités considérables d’or à New-York fera vraisemblablement