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de Nieuport même dont les vieux tableaux troués de l’hôtel de ville nous montraient le plan animée et où l’on voit aussi, en face d’une troupe de reîtres massacrés, un beau rang de vaisseaux de ligne crachant leurs bordées de mitraille, de flammes et de fumées.

Comme le 18, les forces qui défendent les abords de la ville ne sont pas considérables. Le 6e de ligne échelonne ses compagnies, — et ses compagnies sont loin d’être au complet, — de la mer à Lombaerlzyde et de Lombaertzyde à Saint-Georges, en passant par la ferme de Groote-Bamburg. Il se soude à Saint-Georges à la ligne du 7e. Un assaut puissant dirigé sur un seul point de ce front ne peut manquer de réussir. Le jour n’est point encore levé que, par une attaque violente, la 4e division d’Ersatz s’empare de Groote-Bamburg. La situation est grave. A neuf heures du matin, un bataillon du 9e de ligne franchit en courant les écluses de Nieuport, se jette immédiatement au combat, reprend la ferme, bouche la trouée. Pendant plusieurs heures, la bataille s’immobilise de dune à dune, de tranchée à tranchée, de fossé à fossé. Peu après midi, un assaut général se déclenche contre nous : il est repoussé avec d’énormes pertes. A trois heures, une nouvelle poussée locale perce à nouveau notre ligne au Sud du village. Le 9e régiment, qui contre-attaque avec le même entrain que le matin, ne peut, cette fois, rétablir les choses. Les Belges sont forcés de se retirer de Lombaertzyde, que les Allemands occupent après treize heures de combat. Ils s’installent, sans quitter la rive droite, sur des positions préparées d’avance, à six cents mètres en arrière du village, et suffisantes encore pour protéger les ponts de Nieuport. Jamais ils n’en seront délogés. Au contraire, les jours suivans, ils rebondiront en avant.

A peine la fusillade diminue-t-elle à Lombaertzyde qu’elle éclaté à Dixmude avec une violence inouïe. Dixmude, qui s’est réveillée sous un bombardement terrible, se tient prête. Elle va vivre aujourd’hui l’une des journées les plus tragiques de son épopée.

Plus rien ne sépare la petite ville des masses ennemies. L’armée allemande tient sous son feu la forêt d’Houthulst, qu’elle occupera demain. La cavalerie française recule de Zarren, où elle campait encore pendant la nuit ; les corps de cavalerie franco-anglais qui opéraient plus à l’Est se replient sous la