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pleine densité de chargement, c’est-à-dire tassées dans la capacité close où on les étudie de façon à la remplir entièrement et à n’y laisser aucun vide, on sait qu’elles sont supérieures à 10 000 atmosphères et qu’on ne peut d’ailleurs pas les mesurer exactement, car l’acier des éprouvettes ne résiste guère à des pressions supérieures à 7 ou 8 000 atmosphères. L’acier, si solide qu’il soit, éclate sous des pressions aussi formidables.

C’est pourquoi les cartouches des canons ou des fusils sont bien loin d’être remplies de poudre (comme on le constate facilement en secouant à son oreille une cartouche de fusil Lebel par exemple). Et c’est pourquoi au contraire, dans les obus explosifs, qu’il s’agit de faire éclater au but, on met des substances explosives que l’on y coule de façon que toute la cavité intérieure de l’obus en soit remplie. D’autres caractères différencient encore, comme nous allons le voir maintenant, les substances qui font exploser les obus de celles qui les chassent hors de la bouche à feu.


Ce qui caractérise particulièrement les substances explosives et en fait une classe de corps à part, c’est, nous l’avons dit, la grande vitesse de leur déflagration. C’est elle aussi qui nous permet de les distinguer les unes des autres et de les classer, dès maintenant, en deux groupes essentiels et que l’on confond trop souvent dans le public.

Contrairement à ce qui a lieu pour la puissance des explosifs qui, comme nous l’avons vu, varie très peu de l’un à l’autre, la vitesse de propagation de l’explosion varie, et même pour un explosif donné, suivant les circonstances, dans des limites énormes et dans le rapport de un à un million et plus, c’est-à-dire que certains corps explosent au moins un million de fois plus vite que d’autres.

Prenons, par exemple, une grosse cartouche de dynamite. Si nous la plaçons sur une table et que nous l’allumions avec une allumette, elle brûlera tranquillement comme une lampe, sans faire de bruit, sans causer de dégât. Si, au contraire, nous donnons à cette cartouche un choc brusque, par exemple un coup de marteau, elle explosera instantanément avec un bruit formidable et avec une telle force que tout sera détruit dans le voisinage et que la table sur laquelle nous l’avions placée sera réduite en miettes, fût-elle en acier trempé. Dans le premier cas, la dynamite a brûlé, dans le second, elle a détoné.

Comment deux cartouches identiques ont-elles pu produire des effets aussi différens selon les circonstances ? Cela tient à ce que la