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a mené la vie la plus ennuyeuse du monde ; il n’a pas vu une âme, excepté son frère Joseph, qui vit aussi très retiré. Quant à Lucien, il est quelquefois des semaines entières sans qu’on sache où il est, et, chose inouïe, à la nouvelle de l’événement de Strasbourg, Lucien et Joseph voulaient faire une protestation contre. C’est Jérôme qui les en a empêchés, ne voulant pas la signer.


Mercredi 4 janvier 1837.

… La Reine, sentant combien il était important que la brochure de M. de Persigny arrivât aux députés et aux journaux avant l’ouverture de la Chambre, avant la réponse au Roi, s’est décidée à envoyer M. Cottrau, à Zurich, pour en faire imprimer deux cents exemplaires ; il a envoyé un exprès pour dire qu’ils seraient prêts pour le vendredi, et le départ de Charles a été retardé de deux jours, pour qu’il puisse en emporter à Strasbourg. J’ai écrit par lui au Prince et à M. Arese, dont je ne reçois rien, malgré la promesse qu’il m’avait faite de m’écrire. L’acte d’accusation pour le procès de Strasbourg a paru. Il fait honneur au caractère du Prince plutôt que tort. M. Parquin est furieux qu’on lui fasse crier : « Arrêtez-les, arrêtez-les, » voulant s’échapper.


Réponse à M. Parquin écrite par la Reine.

Notre seule occupation est de lire et de relire les débats, et nous attendons l’heure du courrier avec la plus vive impatience. Nous admirons votre courage et votre présence d’esprit, et nous espérons bien que le jury sera influencé par tout ce qu’il y a de noble dans les réponses de tous les accusés. Une seule chose n’a pas été assez répétée par le Prince, chose qui lui nuit beaucoup et peut nuire à son avenir, surtout près de sa famille. C’est qu’il ne se présentait pas comme souverain, qu’il n’en avait pas la prétention, puisqu’il projetait rappel au peuple, et que c’est lorsqu’on a vu que les cris de « Vive l’Empereur ! » avaient autant d’empire sur les soldats, que les officiers du Prince ont fait entendre aussi ce cri. Quant à la déposition de Charles, elle est bien niaise, puisqu’il dit que le Prince paraissait content de son enlèvement. Charles a dû vous dire à tous ce qu’il a dit ici : c’est que le Prince croyait qu’on le menait à