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je me retirerais, pourvu que ce ne fût point à Paris. Je dis que je choisissais le diocèse de Meaux… »

« … Je sortis le 10 de mai 1697, avec ma sœur du Tourp. Pendant que nous sortions par une porte, on se disposait à faire sortir par une autre ma sœur de Montaigle, qui ne s’attendait à rien moins. »

L’exécution avait été si prompte que Mme de la Maisonfort resta plusieurs jours sans savoir où elle irait. Les démarches de M. de Meaux pour la recevoir n’étaient point terminées. « Dans l’incertitude où cela me tint, » écrit-elle, « ce verset de David me revint souvent : « Toutes mes aventures, Seigneur, sont entre vos mains. » Je m’en sentis consolée et, ce me semble, plus abandonnée à Dieu. »


Pendant que les pauvres filles s’en allaient vers la honte et l’inconnu, où était leur mère ? Mme de la Maisonfort a un mot terrible dans sa brièveté : « Nous partîmes sans prendre congé d’elle… »

Elle était fort occupée à rassurer la communauté consternée. « Toutes les Dames pleuraient et craignaient pour elles-mêmes : voyant que les vœux solennels qu’on avait faits pour plus grande solidité n’exemptaient pas des lettres de cachet, elles s’imaginaient qu’il ne fallait plus compter sur rien. » Mme de Maintenon leur dit qu’elle s’était fait une extrême violence en souscrivant à la condamnation des exilées. « Vous ne pleurerez jamais tant vos sœurs que je les pleure depuis quatre ou cinq ans et encore plus depuis quatre ou cinq mois que je voyais qu’il faudrait venir à ce qui s’est fait. Je les aimais par inclination et par estime, les voyant très vertueuses ; mais je dois préférer le bien de la maison à toute autre considération. »

Soit ; ne lui contestons pas que l’exécution fût nécessaire. Mais la rigueur dont elle l’accompagna ? Cette froideur, cette disgrâce, cette sorte de rancune qui creuse la blessure au lieu de la fermer ? Mme de la Maisonfort une fois chassée de Saint-Cyr, incapable de nuire ou de compromettre, l’amitié qui les avait unies ne reprenait-elle pas ses droits ? Ecoutons l’exilée : « J’ai eu l’honneur de lui écrire au moins tous les ans, et dans certaines occasions ; je n’ai jamais reçu que deux réponses :