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la viande, pour prévenir et limiter, s’il se peut, une élévation excessive des prix. Il faudra en faire autant dans notre pays. Remarquons bien d’ailleurs que cette réduction nous imposera simplement le retour aux pratiques considérées comme normales il y a quarante ou cinquante ans. Voici quelle a été la progression de la production totale de la viande en France de 1862 à 1909 :


tonnes
1862 1 161
1892 1 570
1897 1 920
1909 2 311

Ces poids correspondaient à une consommation par tête qui n’avait pas cessé de grandir jusqu’ici :

kilog. Par tête
En 1862 25
En 1892 41
En 1897 50
En 1909 57

Si l’on admet que la moyenne s’abaisse bientôt à 41 kilos, en diminuant de 15 kilos ou de 28 pour 100, proportion énorme, la population civile se trouvera, au point de vue alimentaire, dans la même situation qu’en 1892. Si cette perspective est fâcheuse, on ne saurait dire qu’elle est effrayante. Il existe à cet égard de regrettables erreurs qui consistent à supposer qu’une grande quantité de viande est indispensable au maintien de la santé et à la conservation de la force. En parlant des préjugés sur l’alimentation normale, le professeur A. Gautier, — que cite M. Quentin dans son rapport, — a eu raison sans doute de dire :

« Il ne faut pas exclure en principe la viande de l’alimentation ; c’est un aliment facile à digérer qui tonifie les muscles et le cœur et qui excite et soutient la volonté. »

Mais M. Gautier, dans la même étude sur l’alimentation rationnelle de l’homme[1], faisait aussi cette remarque et proposait cette conclusion : « Il faut reconnaître qu’on peut s’abstenir entièrement de viande sans compromettre sa santé et ses forces, et l’on aurait tort de penser que le végétarisme,

  1. Bulletin de la Société scientifique d’hygiène alimentaire et d’alimentation rationnelle de l’homme. Août 1913. Paris, Maason.