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avait vivement frappé nos ennemis n’a pas été renouvelée. On peut dire, à la vérité, qu’il n’y avait vraiment intérêt à poursuivre ces utiles reconnaissances que si on avait été décidé à leur donner une suite effective. On n’y était pas décidé. Quels résultats, pourtant, aurait donnés un système méthodique d’incursions de flottilles aériennes sur ces côtes du Hanovre et des duchés, sur la région même du canal maritime, sur Cüxhaven, Kiel, Lübeck, Hambourg, etc. ! Or, il était aisé de procéder à cette organisation si on avait consenti, il y a quelques mois, à s’emparer, par un coup de main rapide et qui n’eût rencontré aucune résistance sérieuse, de l’île de Sylt, au Nord du long chapelet des îles Frisonnes du Slesvig. Aucune position n’était, à tous égards, aussi favorable à des entreprises de ce genre. Mais quoi ! Il semble que tout ce littoral soit enchanté, qu’on le croie inaccessible partout, intangible, formidablement défendu et par la nature et par l’art des hommes. Or, il s’en faut bien qu’il en soit ainsi. Mais les Allemands ont réussi à le faire croire…

Le changement qui vient de se produire dans le ministère anglais aura-t-il sa répercussion sur la conduite des opérations maritimes ? C’est encore une question. Dans son discours aux électeurs de Dundee, l’ancien premier lord de l’Amirauté a laissé entendre qu’une phase active allait succéder à une passivité énervante et dont tout souffre, l’opinion publique comme l’intérêt général des Puissances alliées : « Nous avons pris la mesure de notre adversaire, a dit M. Winston Churchill ; maintenant, nous pouvons aller de l’avant… » Puissent M. Balfour et l’amiral sir Henry Bradwardine Jackson ratifier une promesse qui, déjà, relève les cœurs et enflamme les courages ! Il serait désolant que l’on ne s’aperçût pas que, quels que soient les obstacles que les Allemands ont pu accumuler à l’embouchure de l’Elbe, l’attaque de cette position sera toujours — de par la nature des choses, et je ne m’attarde pas à le démontrer — plus facile, moins onéreuse que celle des Dardanelles que l’on entreprit, il y a cinq mois, d’un cœur si léger. Quant aux opérations dans la Baltique, une fois le Grand-Belt et son vestibule Sud, le Längeland Belt déblayés de leurs mines, avec l’aide certaine, quand on le voudra énergiquement, des Danois, — et même sans leur aide ! — ce ne serait qu’un jeu pour la puissante marine britannique.