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d’Amérique, « sans vouloir empiéter sur les droits de quiconque, écrit M. John Barrett, mais avec la résolution de rechercher tous les avantages légitimes ; » elle dresse l’inventaire des compagnies locales de navigation qui pourraient assurer des relations uniquement américaines, le Lloyd brésilien, la Société argentine Mihanovitch, la chilienne Sud-Americana de Vapores, la Peruvian Stearn Ship Co ; des missions yankees d’industriels, de commerçans, d’universitaires parcourent l’Amérique latine ; des banques de New York ouvrent des succursales à Buenos Aires, Rio de Janeiro, Valparaiso ; une assemblée de financiers des deux continens américains se réunit a Washington (mai 1915). La session du Congrès panaméricain de 1914, remise à 1915, traitera pendant l’Exposition de San-Francisco des questions de douanes, de navigation, d’échanges postaux ; les Congressistes tiendront vraisemblablement quelques séances à Panama et seront invités à des fêtes célébrant l’inauguration du canal.

Témoin nécessairement distrait, l’Europe enregistre ces faits qu’elle remarque à peine. Cependant, la France et l’Angleterre ont su témoigner à temps qu’elles n’en prenaient point ombrage : ayant à se plaindre des facilités de ravitaillement et de communication télégraphique accordées à leurs adversaires par l’Equateur et la Colombie, elles ont prié Washington de rappeler courtoisement ces républiques au respect d’une stricte neutralité. Les Etats-Unis ont répondu, sans vouloir s’engager à faire eux-mêmes la police de tout le nouveau continent, que la doctrine de Monroe ne s’opposait pas à un débarquement provisoire de marins venant détruire des stations de télégraphie sans fil ; ils n’ont pas rejeté une proposition, dont le principe fut bien accueilli par les associés de la Triple-Entente, à l’effet de neutraliser et d’interdire a tous navires de guerre des belligérant une zone de deux cents milles au large de toutes les côtes américaines. En revanche, l’attitude, de l’Allemagne est de plus en plus critiquée ; l’ambassadeur de Guillaume II à Washington dut multiplier les démarches, pour rattraper une parole trop franche, que « la doctrine de Monroe n’empêcherait pas les Allemands de débarquer au Canada, s’ils le voulaient ; les Yankees lisent avec dédain les articles insolens de la Gazette de Cologne, menaçant les Etats-Unis de représailles après la guerre, s’ils entravent le libre commerce du pétrole