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deux moitiés de la monarchie pour les titres émanés de chacune d’elles. En Autriche comme en Hongrie, on a bruyamment proclamé le succès de l’opération ; dans son ensemble, elle aurait fourni trois milliards de couronnes, dont un tiers à peu près aux Magyars, deux tiers aux gens de Vienne. Mais, en admettant que ces chiffres soient exacts, la somme est depuis longtemps dépensée et il faut de nouvelles ressources. On a parlé d’avances faites par Berlin : 200 millions de couronnes auraient été prêtés récemment à l’Autriche, 100 millions à la Hongrie. Ce sont là de bien faibles montans en comparaison des dépenses journalières. Il est probable que la Banque austro-hongroise est, dans une large mesure, venue en aide au Trésor. Dès le mois de novembre, la Banque et les Caisses de prêts s’étaient engagées à faire des avances au taux de 5 et demi pour 100 sur les titres des nouveaux emprunts. Au mois d’avril 191.", on a annoncé que l’Autriche-Hongrie allait tenter sur le marché de Berlin l’émission d’un emprunt de 800 millions de marks sous la forme de bons du Trésor austro-hongrois. Au mois de mai 1915, l’Autriche et la Hongrie procèdent à de nouvelles émissions. L’Autriche offre à 95 1/4 pour 100 des Bons à 10 ans ; la Hongrie donne aux souscripteurs le choix entre une rente 6 pour 100 à 97 1/2 ou une rente 5 1/2 pour 100 à 90,80.

Nous avons une preuve indirecte de la création abusive de papier qui a dû être faite, dans le cours du billet austro-hongrois, qui perd déjà 25 pour 100 de sa valeur. La couronne ne vaut plus que 80 centimes de notre monnaie, alors que sa parité est de 1 fr. 05. C’est là le témoignage irrécusable de la méfiance qu’inspire la situation de la monarchie des Habsbourg, qui souffrait depuis plus de trois ans de la crise balkanique : dès 1912, son commerce et ses finances avaient ressenti, plus vivement que ceux d’aucune grande nation européenne, le contrecoup des événemens qui avaient mis aux prises la Bulgarie, la Serbie, la Grèce et le Monténégro avec la Turquie.

Le 30 décembre 1914, le Gouvernement hongrois a publié une ordonnance d’après laquelle les paiemens qui, en vertu de conventions antérieures, devaient être faits en or, pourront l’être en n’importe quelle monnaie ayant cours légal : le montant à payer sera déterminé d’après le cours du jour. C’est un manquement absolu aux engagemens pris.