Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 27.djvu/366

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sont soumis. Le sénateur chargé en 1910 du rapport sur la révision des droits de douane prit le chiffre de 181 fr. 60, porté sur un mémoire comme ayant été perçu à l’entrée d’un stock de jouets, pour le droit général imposé ad valorem sur cet article, et il imprima bravement dans son rapport que les jouets payaient déjà à la douane française une taxe de 181 pour 100. Ce sur quoi le Sénat conclut que la Chambre avait eu tort et qu’il ne fallait point les taxer davantage !

Un des moyens employés par l’Allemagne pour développer son exploitation était les tarifs des chemins de fer : -il en coûtait moins pour aller de la frontière allemande à Marseille que de Paris à Marseille ; il n’en coûtait pas plus pour venir à Paris de Nuremberg, — 900 kilomètres, — que de Chalon-sur-Saône, — 400 kilomètres. De sorte que les industriels allemands, payant seulement 9 francs par 100 kilomètres, tandis que les Français en payaient 25 à l’intérieur, pouvaient offrir chez nous leurs marchandises avec un avantage marqué.


VI

Nos fabricans se plaignent aussi de manquer d’argent. Un Français, à Hambourg, demandait à un Allemand, gros exportateur dans les quatre parties du monde : « Comment parvenez-vous à vous faire payer de ces destinataires exotiques dont le crédit est douteux ? » — « Ils nous payent avec l’argent que vous leur prêtez, » lui fut-il répondu. Il est bien vrai que nos concitoyens les moins cosmopolites sont capables de souscrire, par dizaines et centaines de millions de francs, non seulement à des emprunts de petits États médiocrement solvables, mais même à des valeurs émises par des Sociétés privées de banques, de mines, de ports, de chemins de fer et autres spéculations lointaines, dont le succès est toujours problématique ; et que ces mêmes capitalistes, si aventureux quand il s’agit de l’étranger, se refuseraient à placer, fût-ce quelques milliers de francs, dans un commerce ou une industrie indigène dont le siège social est dans leur pays, peut-être à leur porte, et dont il leur serait facile de surveiller le fonctionnement.

Il est avéré que l’on peut toujours lever aisément sur le marché de Paris, — avec une publicité financière bien comprise,