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l’intervention des pouvoirs publics ; seule, une modification des cœurs et des volontés, engendrée par la conviction des esprits, donnera des résultats, en cette matière, plus qu’en toute autre. Pour amener cette modification, l’action la plus efficace sera celle de la propagande par le livre, par le journal, par la conférence, par l’enseignement. Mais, puisqu’il s’agit, avant tout, d’un intérêt national, la première condition, pour qu’il touche tous les citoyens, c’est que les représentans de la nation marquent l’intérêt capital qu’il a pour elle. Nous ne doutons pas que la grande majorité des électeurs sente, au lendemain de la guerre, le caractère pressant de la nécessité qui s’impose à nous ; pour assurer la durée du premier élan, il faut qu’ils choisissent, à l’avenir, des élus résolus à graver profondément dans les lois, notamment dans les lois fiscales qui se rappellent à tous chaque année, cette nécessité de salut public. Il appartient aux membres du Parlement qui aura à procéder aux premières reconstructions de montrer qu’ils sont déjà de ceux-là.

Les mesures que nous proposons ne constitueraient d’ailleurs nullement une intervention de l’Etat dans les sentimens et les intérêts privés, sortant de ses attributions propres. Elles tendent simplement à obtenir qu’il tienne compte de la nécessité d’enrayer la dépopulation, dans l’exercice de ses attributions normales en matière d’impôts, d’assistance et de police.

Nous tenons d’autre part à constater que ces conclusions ne sont nullement en opposition avec les doctrines des anciens économistes, qui signalaient les dangers d’une natalité excessive. Nous ne saurions admettre, avec l’Ecole historique allemande, que la vérité scientifique, dans les questions économiques et sociales, varie d’une époque à une autre ; c’est là une idée fausse, qui ne peut d’ailleurs conduire qu’au scepticisme absolu ou à la justification de toutes les mesures tyranniques prises par les puissans de chaque jour. La vérité est toujours la même ; seulement, la propagande, à chaque époque, doit s’exercer pour combattre les erreurs qui poussent l’humanité à s’en écarter, tantôt dans un sens, tantôt dans un autre.

Il est certain que la population tendrait à se développer plus vite que les moyens de subsistance, si chaque couple humain procréait autant d’enfans qu’il le peut, physiologiquement, sans se demander comment il les élèvera ; Malthus méritait bien de l’humanité, quand il combattait une pareille tendance, à