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une nombreuse famille ; l’augmentation lente des traitemens les pousse au mariage tardif. Si l’on voyait leur salaire croître aussitôt qu’arrivent les enfans, si les agens qui en ont trois ou quatre à leur charge étaient moins gênés, grâce à l’allocation supplémentaire correspondante, il y aurait là un attrait sensible pour les jeunes gens sérieux, dont le but dans la vie est de fonder une famille. Et l’Etat serait moins souvent entraîné à élever tous les traitemens, par les demandes fondées sur leur insuffisance pour répondre aux besoins d’une famille, si les familles un peu nombreuses recevaient des majorations croissant avec leur effectif.

Ces majorations devraient d’ailleurs s’appliquer aussi bien aux gros traitemens qu’aux petits, car ce sont peut-être les fonctionnaires ayant les qualités nécessaires pour occuper des emplois importans qui reçoivent les salaires s’écartant le plus de la rémunération des fonctions analogues dans l’industrie ; ce sont eux, par suite, qui sont les plus tentés de quitter le service de l’Etat, dès qu’ils ont de nombreux enfans à élever, au grand détriment du service public.

De même, au lieu d’accroître les retraites, et surtout d’abaisser l’âge d’entrée en jouissance, avantages qui profitent plus encore aux célibataires qu’aux pères de famille, toujours désireux de toucher le plus longtemps possible le traitement d’activité, l’Etat devrait assurer à la veuve d’un fonctionnaire mort prématurément une pension proportionnelle au nombre de ses enfans, pendant leur minorité ; l’angoisse du père atteint dans sa santé et exposé à laisser ses enfans sans ressources, s’il n’a pas une durée de services assez longue pour qu’ils aient droit à une pension, est une des plus cruelles que connaissent les agens n’ayant jamais eu un traitement suffisant pour contracter une assurance sérieuse. Favoriser le repos prématuré, au lieu d’assurer quelques ressources à ces misères criantes, c’est une faute que l’Etat non seulement commet, mais encore tend » imposer aux Compagnies de chemins de fer, quand il fait, sur les droits de leurs agens, à pension, des lois et des règlemens beaucoup moins ménagers de leurs deniers qu’il ne l’est des siens propres.

Nous croyons que l’Etat agirait, directement et par l’exemple, dans un sens très favorable à la natalité, s’il affectait désormais toutes les augmentations de sacrifices nécessaires, pour assurer