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La prépondérance conquise par la maison d’Autriche devait exercer sur la situation de la Transylvanie une influence décisive. La victoire de Saint-Gothard n’eut pas pour elle, non plus que pour la chrétienté, la portée qu’on pouvait en attendre. Elle ne gagna à la paix de Vasvar que la reconnaissance de Michel Apaffy comme woïvode. Son sort fut réglé, en même temps que celui de la Hongrie, par la Diète de Presbourg de 1687, où, en acceptant l’intronisation de l’archiduc Joseph, elle renonça au droit électif des États tant que la ligne masculine des Habsbourg autrichiens et espagnols ne serait pas éteinte, à la condition que le souverain prêterait serment à la Constitution. La Diète fut suivie de près par l’occupation des villes transylvaines au mépris de l’engagement d’assurer à Michel Apaffy II la succession paternelle. La docilité des États, l’abandon de leur droit électoral, l’acceptation de l’hérédité s’expliquent par le régime de terreur auquel le général Caraffa avait soumis le pays, sous prétexte d’une conspiration dont le comle Tekeli aurait été le chef. Les condamnations sanguinaires prononcées par le tribunal qu’on appelle le théâtre d’Eperies, du nom de la ville où il a siégé, ont laissé un souvenir indélébile. La résignation des États de 1687 entraîna la ruine des garanties inscrites dans la Constitution. La Transylvanie fut traitée en pays conquis. Beaucoup de familles de paysans, en majorité roumaines, émigrèrent en Turquie et grossirent le nombre de celles qui, s’étant converties au mahométisme, jouissaient, sous la domination ottomane, d’une condition tolérable.

Les mesures prises à la suite de la paix de Carlowitz par le gouvernement de Vienne annonçaient clairement l’intention de faire de la Transylvanie une province autrichienne et la principauté ne pouvait être rassurée sur son sort par les tendances conciliantes de certains patriotes comme l’archevêque de Kolocsa, Szechenyi et de certains personnages dirigeans du conseil aulique dont le plus considérable n’était rien moins que le prince Eugène. Des deux côtés, on était en méfiance et en éveil. Si désireux qu’il fût de conserver sa liberté d’action au moment de l’ouverture prochaine de la succession d’Espagne, le gouvernement impérial ne pouvait s’arrêter dans la voie d’arbitraire où il était entré. Il avait les yeux ouverts sur François Rakoczy comme sur le chef désigné d’une insurrection possible. Fils de François Rakoczy et d’Hélène Zrini qui épousa en