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ce prix. Aussi, lorsque le pape Paul III constitua une commission chargée de rechercher et de proposer des réformes, ce fut parmi cette société qu’il choisit les enquêteurs.

De même que les académies, les universités contribuèrent à faire connaître les idées nouvelles ; celles de Bologne, de Ferrare, de Padoue, de Pavie étaient fréquentées par de nombreux étudians allemands. D’autre part, beaucoup de jeunes Italiens se rendaient en Allemagne pour y achever leurs études ; d’autres allaient en Suisse. Les relations entre les érudits des différentes nations, que l’usage universel de la langue latine rendaient alors plus fréquentes et plus intimes qu’elles ne le sont devenues depuis, furent pour beaucoup dans la dissémination du protestantisme. Sadoleto et Bembo, à ne citer que cet exemple, correspondaient régulièrement avec Melanchthon ; Erasme entretenait un commerce de lettres avec nombre d’érudits italiens.


Quelques hommes se firent les apôtres, les propagateurs des doctrines luthériennes, avec un grand zèle et un admirable dévouement. Bernardino Ochino fut parmi les plus actifs. Entré dans l’ordre des mineurs conventuels, il en trouva la loi trop douce, et, profitant de la réforme de l’ordre des franciscains d’où devaient sortir les capucins, il partagea leurs austérités. Il prêcha, pâle, portant une longue barbe blanche qui lui tombait jusqu’à la ceinture, ayant les cheveux « aussi blancs que la neige, » et cet air vénérable qui ajoute à la valeur des argumens l’autorité de l’expérience. Son action était inconcevable ; à Naples, sa parole convaincante et sincère enflamma la ville entière. Il lui fallait de l’argent ; en moins de rien, il obtint 5 000 ducats. Le vice-roi Toledo s’émut et consulta l’archevêque Francesco Carafa qui se borna à lui prescrire de demander à Ochino de ne plus traiter de sujets captieux. A Sienne, l’enthousiasme de la foule fut tel que ceux qui ne pouvaient pénétrer dans l’église où il prêchait montaient sur la toiture et en arrachaient des parties pour pouvoir l’entendre. Le conseil communal lui délégua quatre de ses membres pour le conjurer de prolonger son séjour et de faire encore quelques sermons, soit dans la cathédrale, soit au palais communal, « car il était bon et profitable aux âmes que le frère Bernardino continuât encore un certain temps à