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Réforme en Italie ; les prédicateurs, les libellistes, les faiseurs de pasquinades portaient surtout leur effort sur la transformation des mœurs du clergé et la modération des exigences financières de l’Église.

En 1545, l’évêque de Lovello, Feretti, énumérait ainsi les erreurs des hérétiques italiens : « Nier la confession, l’efficacité des indulgences, l’utilité des messes, le libre arbitre, le purgatoire, penser que la foi seule justifie, protester contre le culte des saints, prétendre que le culte des images est une idolâtrie, ne pas jeûner, s’élever contre les vœux monastiques, affirmer qu’on vit en péché mortel, affirmer que, le Christ étant mort pour expier les péchés de tous, il est inutile que chacun expie les siens, affirmer que le Pape n’est pas le chef de l’Église. » D’autre part, parmi les chefs d’accusation qui figurent le plus fréquemment dans les réquisitoires du Saint-Office, on relève : la négation de l’efficacité des pratiques extérieures, la critique des générosités de l’Église et de l’intervention du clergé dans la vie quotidienne. On s’élevait donc surtout contre les dévotions qui étaient une source de revenus pour l’Église.

C’est bien là, en effet, ce qui irritait le plus les Italiens. « Je ne sais, écrivait le fameux historien Guicciardini, ce qui me déplaît le plus, de l’ambition, de l’avarice ou de la mollesse des prêtres… Cependant la situation que j’ai occupée sous plusieurs pontifes m’a obligé à m’attacher dans mon propre intérêt à leur grandeur ; n’avait été cette nécessité, j’aurais aimé Martin Luther comme moi-même, non pour me délivrer des lois qu’impose la religion chrétienne selon qu’on l’interprète et qu’on la comprend, mais pour voir réduire dans ses justes limites cette troupe scélérate, c’est-à-dire à la voir, ou bien sans vices ou bien sans autorité. »


Cependant, il est fort probable que la déférence et la soumission traditionnelle des Italiens envers la Cour pontificale les auraient cette fois encore détournés de donner corps à leurs aspirations, n’avaient été les incitations venues du Nord. L’écho de la grande rumeur que Luther soulevait en Allemagne donna le branle. Pour ce qui est de Calvin, son influence ne se fit guère sentir qu’en Piémont, ainsi qu’à Ferrare, à cause de la présence en cette ville de Renée de France.