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« Maman, écrit de Dixmude à la date du 7 novembre le fusilier C…, d’Audierne, c’est toujours le fourniment au dos et paré au coup de feu sous la mitraille des canons allemands que je t’écris ces quelques lignes pour te donner de mes nouvelles, qui sont très bonnes, et je désire que cette missive te trouve de même ainsi que la famille. Maman, ainsi que toute la famille, vous revoir, je ne compte plus, car pas un de nous ne reviendra. Enfin j’aurai donné ma vie pour faire mon devoir de soldat et de marin. J’ai déjà reçu deux balles : une dans la manche de ma capote et une dans ma cartouchière de droite, et la troisième sera la bonne. »

« À notre escouade, écrit le même jour le fusilier A. G…, sur seize, nous sommes encore trois. » Cependant la nuit du 6 au 7 fut assez tranquille. Et la journée qui suivit lui ressembla. La petite mortification que nous avait causée l’échec de notre offensive sur Woumen était déjà oubliée et l’on se reprenait à l’espoir.

« Je crois, écrivait Alfred de Nanteuil, que ma compagnie ne bougera guère d’ici longtemps… Je fournis, suivant les besoins, une ou deux sections de renfort, les autres et moi-même demeurant ici dans ma tranchée que nous perfectionnons et dans le voisinage d’une ferme qui nous permet de manger chaud. Paille à discrétion. En somme, le grand confort. »

L’impression générale est qu’on est accroché d’un bout à l’autre du front. « Bombardement et fusillade. Guerre de siège partout. Cela finira bien un jour. En attendant, conclut gaiement Alfred de Nanteuil, bon moral, bonne santé. »

Dans l’après-midi cependant, on remarqua, sur l’autre rive de l’Yser, des va-et-vient assez suspects et, comme il était facile de battre cette partie du front ennemi, on se hâta de pointer dans sa direction une de nos pièces de campagne. Était-ce un piège ? Ou quelque espion, par derrière, faisait-il des signaux ? La pièce n’était pas plutôt en action qu’une batterie allemande se démasquait et la prenait sous son feu : un des projectiles tua net le capitaine de frégate Marcotte de Sainte-Marie, qui surveillait les effets du tir.

Désormais les attaques ne vont plus cesser. La nuit du 7 au 8 ne fut qu’une longue série de tentatives sur notre front, qui

    Richard, les enseignes Carrelet, Sérieyx, Rousset, Le Coq, Vigoureux, les officiers des équipages Hervé, Fossey, tués ou morts des suites de leurs blessures.