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teutonne et il continue de le faire : nous ne saurions trop en recommander la lecture. C’était un commencement, mais les publications officielles ont répandu à pleins torrens des lumières nouvelles et il est impossible de ne pas éprouver un sentiment d’indignation et de révolte devant cette accumulation d’actes monstrueux. Puissent ces publications vengeresses se répandre dans le monde entier ! Nous les signalons surtout aux nations neutres, parce que nous comptons encore davantage sur leur impartialité. Nous sollicitons leur jugement, qui sera celui de la postérité. On ne sait trop ce dont il faut le plus s’étonner ici, ou de la cruauté, ou de la stupidité de tout cet étalage de sauvagerie. Si tant d’actes odieux étaient dus à l’emportement, sur le champ de bataille, d’une race naturellement violente et brutale, on pourrait les expliquer. Mais non : les soldats ont exécuté les ordres reçus ; les officiers ont donné ces ordres ; les savans allemands les ont approuvés, ils en ont revendiqué la solidarité et le journal la Post déclare maintenant qu’ils ont eu pour objet, par pure humanité, d’abréger la guerre en répandant l’épouvante. Tout devait fléchir et se soumettre sous l’influence de cette lâcheté. C’était confondre la terreur avec l’horreur. Personne n’a fléchi, personne ne s’est soumis, tout au contraire, et. si la science allemande avait conservé assez de liberté d’esprit pour contrôler ses théories par les faits, elle s’apercevrait de la faute commise. Si on se place au point de vue utilitaire qui est le sien, qu’on nous dise quelle utilité, quel avantage, quel profit l’Allemagne a retirés des incendies de Louvain, de Reims, d’Arras, etc. Et tout ce sang qu’elle a répandu hors du champ de bataille avec une férocité mêlée de sadisme, croit-elle qu’il fécondera ses lauriers ? Il semble bien qu’elle commence à en douter ; mais il est trop tard pour se reprendre, peut-être même pour s’arrêter. La vengeance d’en haut est sur ceux qui ont profané la morale divine et humaine : ses arrêts seront exécutés.

Généralement, les maladresses allemandes sont assaisonnées de barbarie, mais quelquefois elles se présentent sans alliage, et c’est ce qui vient d’arriver dans le cas de l’archevêque de Malines. Le cardinal Mercier a écrit une lettre pastorale dont il a ordonné la lecture dans les églises pour tracer aux catholiques leur devoir dans les circonstances troublées que traverse la Belgique. Aux autorités légales de leur pays et avant tout au Roi, ils doivent l’obéissance, cette obéissance librement consentie qui est un acte libre de la volonté. A l’envahisseur étranger, ils ne doivent que la soumission extérieure, celle qu’on ne saurait s’abstenir d’avoir envers un fait qu’on ne peut pas