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Anglais, — qu’il ne fallait plus songer aux débarquemens en pleine guerre sur le territoire ennemi, si favorables que les circonstances politiques et militaires pussent paraître ace genre d’opérations. Mais quelle ne fut pas la surprise de ces dociles élèves des Kraatz-Koschlau, des Von der Goltz et des Bernhardi, lorsque, voyant sa flotte grandir rapidement, en même temps que toutes ses ressources maritimes prenaient un admirable essor et qu’elle savait adapter à ses ambitieux desseins les armes puissantes créées par des rivaux qui les laissaient tomber de leurs mains insouciantes, l’Allemagne proclama tout d’un coup qu’elle entendait se servir largement de la mer pour les opérations de ses armées et que l’invasion de la Grande-Bretagne n’était pas de celles qui pussent étonner son courage, ni mettre en défaut la profondeur de ses calculs !

On a vu, ces dernières semaines, que ce n’étaient point là de vaines menaces, comme on l’avait cru d’abord ; et, si l’admirable vaillance des soldats alliés aux champs de Flandre a contraint le tenace ennemi à surseoir à l’exécution de projeta parfaitement arrêtés dans tous leurs détails, soyons assurés qu’il n’y a point renoncé, Il n’est point nécessaire de partir de Calais pour toucher aux rives anglaises. Disons seulement que, quelle que soit l’habileté et la résolution de l’état-major allemand, quelle que soit l’étendue de la préparation de ses desseins, ainsi que celle des moyens dont il dispose, quelque consommé enfin et quelque inattendu dans ses effets que puisse être l’art avec lequel il se servirait en un tel cas des armes auxquelles je faisais allusion tout à l’heure, rien ne prévaudrait contre cette seule circonstance que ses escadres ne seraient point, à moins d’une victoire bien improbable, maîtresses de la mer,

Oui, mais c’est donc que nous, les Alliés, nous le sommes ?


Contre-amiral DEGOUY.