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Il a fait maintes lectures, examiné les livres des navigateurs. Le 4 mars 1787, il lit La figure de la Terre (édition in-8o de Lyon 1756) de Maupertuis, qui « navigua dans la neige ; » il lit le voyage de l’amiral Anson et l’histoire du Kamchatka : Il s’intéresse à la figure de la terre ; il est ému de voir grandir, dans sa pensée, l’idée ancienne de la planète que nous habitons, autrefois petite, enfermée dans un horizon qu’élargit l’effort continu des navigateurs. Le mercredi 4 juillet 1787, il note comme un bel incident de sa vie ceci : « J’ai vu, ce jour-là, pour la première fois la carte théodosienne appelée de Conrad Peutingerr. » Il lit, au mois d’août, l’histoire de l’astronomie, de M. Bailly ; et il note sur son carnet que vient de paraître, sous le nom de M. Letourneur, la traduction du Voyage au Cap de Bonne-Espérance, de Sparrmann ; il la lira bientôt. Il lit le « Voyage à la baye d’Hudson en 1746 et 1747, pour la découverte du passage nord-ouest, par M. Henry Ellis, gentilhomme, agent des propriétaires pour cette expédition. Paris, 1749, in-12. » Il lit, dans le Mercure de France, un compte rendu de la Vie du capitaine Cook, par le docteur Kippis, de la Société royale de Londres ; traduite en notre langue par M. Castéra. Il lit Détails nouveaux et circonstances sur la mort du capitaine Cook, traduites de l’anglais (à Londres et se trouve à Paris, 1786). Il lit la Théorie de la Terre… Et il est enchanté, comme le jour d’autrefois où il quitta Montignac-sur-Vézère pour la ville rose de Toulouse : — car il devine l’étendue de la terre, vaste au gré de son imagination ; — et comme au temps où, frais débarqué à Paris, il entendait M. Diderot lui raconter mille prodigieuses fantaisies ; — car son esprit découvre des perspectives nouvelles.

En 1785, son cher ami Fontanes est parti pour Londres. Et Joubert l’a prié d’attraper là-bas, touchant Cook et ses compagnons, des informations que l’on n’avait point à Paris. La correspondance des deux amis témoigne du souci de Joubert. Le 10 novembre 1785, Fontanes écrit : « J’ai dîné avec le capitaine Carteret, qui a fait le tour du monde avec votre ami Cook… » Votre ami Cook : et cela confirme les sentimens que, treize ans plus tard, Joubert déclare à Pauline de Beaumont… « J’ai vu le portrait original d’Omay dans le cabinet du chevalier Reynolds… » Et Omay était un Otahitien que Jacques Cook avait amené à Londres… « Vous voyez que je songe à vous. Sitôt que Banks… » Banks le naturaliste, l’un des compagnons de Cook…