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materia tanta delicata. Dizzô altro non posso ne devo dire, se non che Ella faccia a nome mio tutto quello, che con tutta coscienza più farsi e promettersi senza contraere debito con Dio, potendo per altro asseverare che, come uomo di onore, non sarei mai per mancare al mio dovere verso chi mi ha beneficato come prescindendo dal présente caso, conserve sempre viva la memoria delle mie obbligazioni alla sagra e gloriosa memoria di Clémente XI. Per altro, io non desidero, che dè sortire dal conclave colla salute prima dell’ anima poi del corpo, ed a tal fine non m’ingerisco in alcun maneggio, non sortendo dalla mia cella che per andare allo scrutinio et sia quella che Dio ha disposto, alla cui suprema volontà mi umilio con la maggior venerazione. » De ce noble langage, la « noire malice » du camerlingue allait tirer de quoi ruiner la candidature d’Aldovrandi ! — Le 5 juillet, à l’issue du scrutin qui avait donné trente et un suffrages à ce cardinal, Albani informa ses confrères, « avant qu’ils n’allassent plus loin, » que le candidat proposé à leurs votes s’était rendu coupable de simonie, en s’efforçant de corrompre les électeurs par des promesses tentatrices, et, à l’appui de son dire, il exhiba la lettre du P. Ravali. Ce fut un coup de théâtre. Se dressant sur son trône, pâle, les mains crispées, Aldovrandi réclama la parole. D’une voix étranglée par l’émotion, il relata minutieusement ce qui s’était passé et, pour toute conclusion, dédaignant de faire l’apologie de sa conduite, il somma le camerlingue de donner incontinent lecture à l’assemblée de la correspondance incriminée. La lettre de Ravali était devenue inintelligible : une main scélérate en avait effacé ou biffé la plus grande partie ! « Bien que la réponse d’Aldovrandi, écrit Saint-Aignan à Fleury, eût suffi à elle seule à dissiper le soupçon, cela a tout de même fait grand effet, et ceux qui n’allaient qu’à contre-cœur à Aldovrandi ont déclaré vouloir se retirer pour l’instant, ce qui a dû faire ajourner la proposition du candidat. » — Elle fut reprise le surlendemain. Ce jour-là, en effet, à l’ouverture de la séance, Aldovrandi produisit un double de la lettre du P. Ravali : celui-ci en garantissait la copie, « la main sur sa poitrine sacerdolale », et l’accompagnait de ce serment : « Je jure de plus que ledit mien billet n’a jamais esté par moy ni altéré, ni biffé dans la moindre partie, ny aussi consigné à personne du monde, et trouvant qu’il me manque, il faut dire qu’il m’a esté enlevé secrètement. »