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L’ALSACE FRANÇAISE.

Marseillaise jaillit, comme un hymne libérateur, de la poitrine d’un gentilhomme français, Rouget de l’Isle, au pied de la cathédrale de Strasbourg, chez un magistrat de la ville, entre ses deux filles enthousiasmées et les volontaires de l’armée du Rhin ? — Oui, l’Alsace songe à tout cela. Alors, à travers ses deuils, une espérance la traverse comme une flèche. Elle se dit que la France, aimée des nations et des Dieux, ne peut pas mourir. Comment l’Alsace, en pensant aux cinq mille Alsaciens partis au premier cri de guerre sous le drapeau français, ne sentirait-elle pas bondir dans son cœur l’étincelle celtique et la flamme française ?

Une Europe nouvelle, l’Europe fédérée, se lève à l’horizon. Son pacte, cimenté par le sang versé pour la cause commune, s’est conclu d’un libre élan vers un même idéal de justice et d’humanité. Elle châtiera les coupables et réglera les limites et le sort des peuples selon leurs âmes et leurs volontés. Alors l’Alsace-Lorraine, qui fut pendant un demi-siècle, aux mains de l’Allemagne, le gage d’une victoire inique, celle de la force brutale sur le droit, l’Alsace-Lorraine rendue à la France sera le gage et le symbole d’une victoire sereine et radieuse : celle du Droit sur la Force.

Édouard Schuré.