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LA QUESTION D’ALSACE-LORRAINE
DANS LE
ROMAN FRANÇAIS CONTEMPORAIN


J’ai essayé de penser à autre chose, d’écrire sur autre chose ; je n’ai pas pu. Au moment où le sort de la France et, on peut bien le dire depuis l’abominable destruction de la cathédrale de Reims, de la civilisation humaine se joue sur les champs de bataille, l’heure n’est plus à l’histoire, à l’étude sereine du passé. L’histoire, nous la voyons se faire sous nos yeux ; nous en sommes les témoins anxieux, angoissés. Et nous qui n’y travaillons pas directement, à cette histoire, nous qui n’avons pu « partir, » — ah ! comme la pure littérature nous paraît vaine aujourd’hui, comme nous avons besoin de nous dire que, si notre plume ne vaut pas un fusil, elle n’est pourtant pas entièrement inutile, que nous pouvons peut-être élucider, sinon résoudre, certaines questions qui, demain, vont se poser avec une pressante acuité ! En tout cas, ces pensées-là nous aident à vivre ; et ce sont elles qui m’ont conduit au sujet que je voudrais brièvement effleurer dans les pages qui vont suivre.

Depuis quarante-quatre ans, la question d’Alsace-Lorraine a défrayé nombre de romans français. Je ne les connais pas tous, et je ne parlerai pas de tous ceux que je connais. Quelles qu’en soient d’ailleurs les qualités, je ne dirai rien, par exemple, de deux volumes assez récens, les Exilés, de M. Paul Acker, et l’Alsace qui rit, de Jeanne et Frédéric Régamey, auteurs de