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deux professeurs de philosophie, le professeur de philosophie théorétique et le professeur de philosophie morale. Je m’entretins pendant quelque temps avec le premier des deux. Il me confia qu’il ne faisait pas moins de huit cours par semaine. Trois seulement étaient consacrés à la philosophie proprement dite, trois autres portaient sur la pédagogie, — sur la pédagogie élémentaire et pratique ; enfin, il devait consacrer deux séances, une le jeudi, une le dimanche, à la direction d’exercices scolaires dans une école normale primaire. Quel que soit le talent et le zèle du maître (celui-ci était un homme qui avait certainement travaillé, qui avait même jadis modifié avec réflexion ses propres idées et rectifié le système de ses croyances), il lui est difficile de suffire à un enseignement à la fois si chargé et si peu propice aux études personnelles. Ceci m’amène à l’étude du corps professoral lui-même, et tout d’abord de son organisation et de son recrutement.


Le mode de nomination aux chaires de l’enseignement supérieur est réglé en Italie par des principes très libéraux. Ce que nous appelons en France l’agrégation des facultés (elle ne subsiste d’ailleurs chez nous que pour le Droit) n’existe pas. Les aspirans sont appelés à faire leurs preuves à leur idée, par leurs écrits et par leurs cours libres ; et quand une chaire est vacante, c’est le concours sur titres qui agit. Les professeurs compétens nomment cinq délégués qui dressent une liste et arrêtent les rangs ; le Conseil supérieur donne également son avis, et le ministre choisit.

Ce qui est surtout à remarquer, c’est que la commission chargée des présentations est souveraine. Elle peut choisir une femme aussi bien qu’un homme et un étranger aussi bien qu’un Italien. Aucune doctrine, aucune réputation politique n’est de nature à décourager les concurrens. Autrefois les professeurs d’universités devaient prêter serment au Roi et au statut. On a trouvé que cette obligation pouvait gêner des professeurs étrangers : on l’a supprimée pour tous. De même, les candidatures féminines n’ont pas ce caractère exceptionnel qu’elles ont encore en France ; car on a non seulement à Cagliari, mais à Rome et à Naples (à Rome, Mlle Labriola, successeur de son père en la chaire d’économie politique), des professeurs