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confiance. » Quant au pays, son attitude est précisément celle qu’on pouvait désirer ; elle est faite de calme, de résolution. Puisse le fléau de la guerre s’éloigner de nous ! Mais s’il en est autrement, tout le monde fera son devoir.


On sait où était M. le Président de la République quand l’Autriche a jugé l’heure favorable pour elle. Les préoccupations du jour, quelque inquiétantes qu’elles soient, ne sauraient détourner notre attention reconnaissante des marques de sympathie que le représentant de la France a reçues à Saint-Pétersbourg et à Stockholm. À Saint-Pétersbourg, en particulier, l’accord de deux grands pays s’est manifesté avec éclat et ceux qui ont pu redouter que l’alliance n’eût perdu, à l’épreuve du temps, quelque chose de sa vertu première ont été détrompés par l’événement. Jamais, au contraire, elle n’a paru plus solide, sans doute parce qu’elle n’a jamais été plus nécessaire et que les bienfaits en ayant été également appréciés de part et d’autre, elle a acquis des forces nouvelles à mesure qu’elle durait. Rarement rencontre de deux chefs d’État avait été l’objet d’une attention plus grande. On attendait les toasts qui devaient être prononcés par l’Empereur et par le Président, et on leur attribuait par avance plus d’importance que n’en ont d’ordinaire ces discours d’apparat. Cette importance est généralement un peu voilée par la prudence avec laquelle tous les mots sont pesés de manière qu’ils ne disent ni trop ni trop peu : ils ont réussi cette fois à dire exactement ce qu’ils voulaient dire et à préciser les intentions, le caractère, la portée d’une alliance à laquelle l’Angleterre est venue apporter une force nouvelle par l’adhésion qu’elle lui a donnée. Le caractère de la Triple Entente, — nous en parlerons aujourd’hui dans les mêmes termes que nous l’aurions fait hier, — peut être défini en deux mots : la paix par l’équilibre, la seule qui assure à la fois l’indépendance réciproque et la dignité de toutes les nations.

Il faut citer les passages les plus expressifs de ces toasts : les textes parlent mieux ici que tous les commentaires qu’on pourrait en faire. « Unies de longue date, a dit l’Empereur, par la sympathie mutuelle des peuples et par les intérêts communs, la France et la Russie sont depuis bientôt un quart de siècle étroitement liées pour mieux poursuivre le même but, qui consiste à sauvegarder leurs intérêts en collaborant à l’équilibre et à la paix en. Europe. Je ne doute point que, fidèles à leur idéal pacifique et s’appuyant sur leur alliance éprouvée, ainsi que sur des amitiés communes,