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l’un des membres de la Chambre était proposée, il s’y opposerait de tout son pouvoir. » Rassurés, les conspirateurs continuèrent sans trouble leurs agissemens.

Les propositions insensées se succédèrent sans interruption. Jules Ferry demandait la liberté du commerce des armes et, à la Commission qui la lui refusait, il répondait : « L’officiel ne sauvera pas la France, la France ne se sauvera que par elle-même. Si on hésite à rendre libre la fabrication des armes de guerre, c’est que l’on craint que ces armes ne tombent entre les mains des ennemis du gouvernement ; que l’on dise cela et que l’on sache que, enfin, s’il y a quelque chose qui paralyse la défense nationale, c’est l’intérêt dynastique. » (Dénégations au centre et à droite.) (25 août.) Gambetta, Barthélémy Saint-Hilaire continuèrent à déposer une série de pétitions demandant, les unes que : « comme tous les citoyens valides, les séminaristes, abbés, moines, frères, fussent appelés à défendre le sol de la patrie menacée, » les autres protestant contre les opérations des conseils de révision. Glais-Bizoin réclamait l’élection de tous les officiers de la garde nationale (29 août) ; Raspail, au nom des épouses, des mères, des filles, au nom de la justice, au nom de la France, au nom de l’Humanité, proposait l’amnistie générale de tous les délits politiques et délits de presse (31 août). Jules Favre s’indignait que les honorables citoyens de Belleville ne fussent pas encore armés et qu’on accueillit par des rires et des murmures leurs réclamations patriotiques : un commandant de bataillon leur avait déclaré qu’ils n’auraient pas de fusils 1 Jules Favre exigeait justice immédiate de l’injure adressée à de tels patriotes. « Que le sang français, s’écriait Gambetta, retombe sur ceux qui ont refusé d’armer les citoyens ! — Oui, c’est une trahison ! » ajoutait Jules Favre. (30 et 31 août.)

Kératry proposa de charger le Comité de défense de réviser d’urgence les nominations des officiers de la garde mobile (31 août) : « Beaucoup de ceux qui avaient été nommés manquaient de l’expérience nécessaire pour conduire les hommes au feu ; leur nomination avait été un acte de favoritisme ; laisser continuer ces erremens, c’était envoyer les gardes mobiles à la boucherie. » Dans l’histoire parlementaire, il n’y a rien de plus médiocre, de plus décousu, de plus niais, de plus honteux, de plus déshonorant que ces dernières séances du Corps législatif.