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hélium et qui n’a été trouvé que bien longtemps après dans l’atmosphère de notre planète.

Le spectroscope, cet outil unique de merveilleux savoir, fournissait, lors de chaque éclipse nouvelle, une telle moisson de découvertes, les expéditions organisées chaque fois étaient d’autre part si dispendieuses et si aléatoires (puisqu’un seul nuage suffisait à les rendre inutiles) que l’on en vint à désirer impérieusement des méthodes qui permettraient de voir, même en dehors des éclipses, ce que ces capricieux et fugaces phénomènes montraient seuls jusque-là.

Par exemple de 1868 à 1906, c’est-à-dire en trente-huit ans, le nombre des éclipses totales de Soleil a été exactement de vingt-quatre avec une durée moyenne de 3 minutes et 6 secondes. Un astronome qui aurait pu organiser des expéditions dans toutes les régions du globe où elles ont eu lieu n’aurait donc vu l’atmosphère solaire que pendant moins de 1 heure et demie en tout. C’est peu.

Le premier pas pour remédier à cette situation fut réalisé par Janssen et Lockyer, lorsqu’ils découvrirent leur célèbre méthode aujourd’hui universellement employée pour voir les protubérances en plein jour. Elle est trop connue pour qu’il soit besoin de la décrire ici.

Dès lors, en ce qui concerne au moins la chromosphère et ses sommets protubérantiels, l’observation des éclipses totales devenait presque superflue. En revanche, tous les efforts tentés jusqu’ici pour observer la couronne en dehors des éclipses ont échoué complètement. De là l’ignorance dans laquelle nous sommes encore relativement à la nature exacte de cette gloire dont se nimbent parfois les faces superposées de la Lune et du Soleil. Pourtant il est bien établi que la couronne est formée de gaz extrêmement ténus et transparens qui tiennent en suspension des poussières très subtiles et qu’elle est si légère que, malgré son énorme épaisseur, elle est transparente à la lumière des étoiles.


Si l’observation de la couronne en dehors des éclipses est encore impossible, en revanche les astrophysiciens ont réalisé une œuvre magnifique en nous dotant, avec le spectrohéliographe, du moyen d’observer continuellement des phénomènes que les éclipses elles-mêmes ne montraient pas, cachés qu’ils étaient alors derrière le disque opaque de la Lune : je veux parler des diverses couches de l’atmosphère solaire, non plus seulement au bord du disque d’Hélios, mais sur toute la surface de celui-ci.