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dévouement à ses intérêts particuliers ? Dans la plupart des professions de foi, figurent, en effet, en première ligne l’attachement au sol natal, la connaissance parfaite des « besoins » des « chers citoyens » au milieu desquels on a toujours vécu, l’engagement de défendre en toute occasion leurs intérêts économiques et personnels, fût-ce au détriment de l’intérêt général. Quoi qu’il en soit, il est impossible de tirer des conclusions précises des élections du 26 avril : elles ont eu pour effet de faire perdre à chaque parti dans diverses circonscriptions des sièges qu’ils ont conquis dans d’autres. Tout le monde reconnaissait d’ailleurs qu’il n’y avait rien de changé après le premier tour ; on prévoyait que la Chambre prochaine ressemblerait à la précédente, qu’elle serait aussi divisée et aussi impuissante.


Ce n’est pas absolument vrai. Les résultats du second tour de scrutin ont été très favorables au parti socialiste et ils ont permis au parti radical unifié de regagner le terrain perdu au premier. Nous n’avons pas besoin de rappeler que ces résultats dépendent uniquement de* l’habileté des manœuvres et des coalitions qui viennent à se produire : selon la tactique qui est suivie par les partis en présence, la composition de la Chambre peut varier à l’infini. Trois systèmes différens de coalitions pouvaient, en effet, être adoptés. Si les radicaux se concentraient, comme ils l’ont fait, avec les socialistes, les deux tiers des sièges vacans devaient nécessairement revenir aux deux partis. Si, au contraire, la Fédération des Gauches s’était unie au parti radical, dans tous les collèges, pour combattre les socialistes, ceux-ci auraient été évincés presque partout. Enfin, si des coalitions s’étaient généralisées contre les candidats radicaux, dans le dessein d’assurer une majorité considérable aux partisans de la réforme électorale, la plupart des candidats radicaux en ballottage auraient été battus. Telle est la conséquence inéluctable du second tour de scrutin : il permet de se livrer aux tractations les plus immorales, mais les plus sûres. C’est une partie de cartes où le gain est acquis d’avance aux joueurs qui se sont entendus pour détrousser leurs voisins.

Les socialistes et les radicaux, ayant voté avec ensemble pour le ministère Doumergue, pendant les quatre derniers mois de la législature, il était facile de prévoir que cet accord se renouvellerait pendant les élections. Il s’est, en effet, conclu