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le projet, a-t-il affirmé, est doublement contrôlée, une première fois avec beaucoup de mansuétude ( ? ) pendant la vie, et une deuxième fois très rigoureusement après décès. »

Il faudrait citer ici les développemens auxquels s’est livré le rapporteur au sujet de ce double contrôle : ce dernier est formidable, au décès, et pour le degré d’inquisition, et pour les sanctions, qui ne comportent pas seulement d’énormes amendes, mais une saisie importante du capital dont le revenu serait suspect d’avoir été évadé, et au sujet de l’étendue de la prescription que l’on veut faire trentenaire, de sorte que toutes les fortunes dans le pays seraient, pendant les trente années de durée de chaque génération, c’est-à-dire, en définitive, à perpétuité, frappées de précarité et de discrédit, étant toujours soumises aux revendications privilégiées du fisc[1].

Qu’on cesse donc de présenter comme anodin et comme acceptable ce projet René Renoult qui est, au contraire, au plus haut degré tracassier et constitue une énorme aggravation relativement au projet Caillaux voté par la Chambre en 1909. Les déclarations faites par le rapporteur à la Chambre sont d’une férocité telle qu’il ne s’en produisit jamais de semblables en France, sauf aux époques complètement révolutionnaires.

L’expérience, comme le raisonnement, démontrent avec évidence que le système de la déclaration du contribuable entraine nécessairement un contrôle minutieux et rigoureux. Si l’on prétend renoncer à ce contrôle ou l’adoucir, ce n’est qu’une manœuvre pour amorcer le système et arriver rapidement au contrôle sans restriction.

La taxation administrative, d’autre part, ne peut échappera l’arbitraire, à la fantaisie et aux faveurs, que si elle repose sur des règles fixes, sur un ensemble d’indices formels, avec des coefficiens précis dont on ne puisse, sous aucun prétexte, s’écarter : valeur locative, nombre de domestiques, voitures,

  1. Voyez dans Le Temps des3 et 8 avril 1914, la reproduction des passages principaux des déclarations du rapporteur, notamment en ce qui concerne la confiscation d’un capital égal à cinq fois l’importance du revenu supposé dissimulé, également sur ce point que la taxation administrative ne libérerait pas le contribuable, mais le laisserait, pendant trente ans, lui et ses héritiers, en butte aux revendications du fisc avec des sanctions telles qu’elles équivaudraient à une confiscation. En Prusse, au contraire, les amendes ne vont jamais au-delà de quatre ou cinq fois le montant de l’impôt ; celles qu’on propose en France sont vingt fois plus fortes.