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simple modification de la vieille formule d’impôt des anciens temps, la capitation graduée. Cette capitation, dite Classentteuer ou impôt de classes, impôt classifié, si on le préfère, objet d’une première révision en 1820, fut, à diverses reprises, modifiée de nouveau, notamment en 1851, en 1873, en 1875, en 1883, en 1891. De 1820 à 1851, elle présentait un haut degré de complication. Les contribuables étaient divisés en quatre classes d’après leur profession et certains indices extérieurs. Chacune de ces quatre classes était divisée elle-même en trois degrés, ce qui rangeait la population en douze catégories, à chacune desquelles correspondait une taxe fixe spéciale. À partir de 1851, on détacha de la Classensteuer ou impôt de classe les échelons supérieurs, ceux concernant les gens aisés ou riches ; on astreignit ceux-ci à un impôt dénommé Einkommensteuer, impôt sur le revenu, qui frappait les contribuables ayant ou supposés avoir un revenu annuel de plus de 3 750 francs, ceux ayant moins de moyens restant assujettis à l’impôt de classe. Une loi de 1891 effectua une modification plus profonde en substituant, pour l’Einkommensteuer ou impôt sur le revenu des contribuables qui en ont un de plus de 3 750 francs, le système de la déclaration au système de la taxation administrative faite d’autorité. Il s’agit, bien entendu, d’une déclaration contrôlée. Le taux de l’impôt est jusqu’ici relativement modéré et à peine légèrement progressif : le taux le plus élevé est de 4 pour 100 sur les revenus dépassant 100 000 marks ou 125 000 francs ; comme il n’existe pas en Prusse de taxe spéciale sur le revenu des valeurs mobilières, on peut dire que, même au degré le plus élevé, c’est une taxe qui ne se présente pas comme excessive. La Chambre des députés de Prusse, la Diète '(Landtag), étant élue d’après le système censitaire le plus rigoureux, fournit une garantie, jusqu’ici du moins, que le taux de l’impôt sur le revenu en Prusse n’aura rien de spoliateur.

Cet impôt est, en revanche, suivant les habitudes du caporalisme prussien, au plus haut degré inquisitorial. Le contribuable est, dans toute la force du mot, un assujetti, livré à toutes les exigences et toutes les recherches des taxateurs. Or, ces taxateurs, ce ne sont pas seulement des fonctionnaires, plus ou moins distans, n’ayant que des rapports intermittens avec l’assujetti ; ce sont des voisins, des concurrens. Le classement des contribuables, comprenant aussi l’examen de ceux qui