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vertu politique à Mexico. Quoi qu’il en soit, à l’heure où nous sommes, il faut souhaiter vivement que M. Wilson arrive à ses fins et que la médiation de l’Amérique du Sud l’y aide d’une manière efficace. La question est de savoir si elle y réussira.

La médiation de l’Argentine, du Brésil et du Chili, de l’A. B. C, comme on dit par une de ces abréviations aujourd’hui à la mode, s’est produite, on s’en souvient, à propos de la réparation d’honneur exigée par M. Wilson après l’incident de Tampico. Mais elle ne pouvait pas se réduire à un si petit objet. Qui se préoccupe maintenant de l’affaire de Tampico et des coups de canon par lesquels M. Wilson exigeait qu’on saluât le drapeau étoilé des États-Unis ? Les trois plus grandes Puissances de l’Amérique latine ne se sont pas mises en mouvement pour si peu de chose : c’est toute la situation maladroitement créée entre Washington et Mexico qu’elles se proposent de liquider et nous formons le vœu qu’elles la liquident en effet. La médiation a été acceptée par les États-Unis et par le Mexique. Il semble bien qu’au premier moment le général Huerta aurait voulu la limiter à l’incident de Tampico : il a dû y renoncer bientôt et ouvrir un champ plus vaste à son activité. Mais s’est-on bien expliqué sur le but à atteindre ? Rien ne prouve que, dans la pensée du général Huerta, la médiation puisse conclure à sa démission et nous serions même surpris qu’il se résignât docilement à cette conséquence : c’est pourtant celle que M. Wilson poursuit par-dessus tout. Enfin les trois Puissances de l’Amérique du Sud ont aussi offert leur médiation aux généraux qui tiennent la campagne contre M. Huerta, mais ceux-ci ne l’ont pas acceptée. Elles auraient désiré que leur entrée en scène amenât la suspension des hostilités, non seulement entre les États-Unis et le Mexique, mais, au Mexique même, entre les fédéralistes qui obéissent aux ordres du général Huerta, et les constitutionnalistes qui obéissent à ceux des généraux Carranza et Villa, et ils n’ont obtenu qu’une demi-satisfaction. Ils l’ont obtenue, — à peu près, — de M. Wilson et du général Huerta ; il y a entre eux suspension des hostilités, bien que les armemens continuent de part et d’autre ; mais il n’en est pas de même entre les constitutionnalistes et les fédéralistes. Les premiers, qui se sentent actuellement les plus forts, se sont emparés de Tampico et ne renoncent nullement à profiter jusqu’au bout de leurs avantages. On serait d’ailleurs étonné que M. Wilson vît leurs progrès de mauvais œil, puisqu’ils peuvent aboutir à la chute du général Huerta, et que c’est même par ce moyen qu’il a d’abord espéré la provoquer. Si Huerta venait à succomber, la question serait considérablement sim-