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forçats évadés ; et comme le lieutenant Collin le soupçonne aussi, et a l’imprudence de montrer quelque défiance, Bill le jette à la mer, profitant de la tempête et de l’obscurité. Les naufragés des îles Fidji sont sauvés : les anthropophages, qui donnent l’assaut au navire échoué, sont repoussés ; on repart. Mais voici que Bill et ses compagnons mettent le feu au navire, et s’échappent dans le canot de sauvetage, après avoir ouvert les cages des tigres. Imaginons la situation du capitaine et de quelques matelots fidèles, perchés sur les hunes pour échapper aux fauves et aux flammes ! Grâce au ciel, miss Anna est restée dans la cabine ; elle fait passer des armes à ces assiégés d’un nouveau genre ; ils abattent les tigres, tandis qu’une voie d’eau providentielle arrête l’ardeur de l’incendie. Le vaisseau fait naufrage, juste à temps, près de l’ile de Tanna, dans les Nouvelles-Hébrides. Sauvés ? Non, perdus, à cause des indigènes. Mais qui est devenu le roi des sauvages, sinon ce même lieutenant Collin que Bill avait précipité dans la mer ? Et comme les bandits ont été jetés par la tempête précisément dans l’ile de Tanna, il est fort aisé de leur donner la chasse et de les exterminer jusqu’au dernier. Il est à peine utile de dire que miss Anna épousera le lieute1 nant Collin. Tel est Un drame dans l’Océan Pacifique qui représente bien la manière générale de Salgari.

Trouverons-nous dans les journaux une originalité plus profonde ? Il y en a beaucoup ; plus même que dans les autres pays : peut-être parce qu’il n’y a pas de nation plus accueillante aux formes de la vie moderne ; Il Puccettino, — Il Giornaletto, — Il Giornalino degli ometti e delle donnine, — Il Novellino, — La Domenica dei fanciulli ; d’autres encore, suivant les régions. Rien n’est plus amusant que de recevoir un journal par la poste, comme les grandes personnes ; c’est avoir un vrai courrier déjà que de décacheter régulièrement, le jeudi ou le dimanche, la feuille amie ; on est connu du facteur, ce qui donne de l’importance. La preuve que les journaux des enfans ressemblent à ceux des pères, c’est que quelques-uns mêlent les préoccupations confessionnelles au soin de distraire ; nous en savons même un qui s’excuse quand il donne des histoires amusantes, se propose de bannir de ses colonnes tout ce qui alimente la fantaisie, et cherche à recueillir « des impressions et des enseignemens du monde réel. » La preuve encore, c’est que la réclame s’introduit dans ces minuscules gazettes, et qu’on y