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épigraphe : « Celui qui ne veut pas travailler ne doit pas manger. — Nous voulons la Liberté, c’est-à-dire l’entier et libre exercice des facultés de l’homme, ayant pour limite le point où il gêne autrui : l’Égalité, c’est-à-dire les mêmes moyens donnés à tous pour parvenir à la place marquée à chacun par sa moralité, son dévouement et son intelligence. Nous pratiquons la Fraternité, qui substitue le dévouement à l’égoïsme et exige le sacrifice de l’individu à la société. » Dans la manchette figure en outre cet avertissement : » ORGANISATION DU JOURNAL. — L’Atelier est fondé par des ouvriers, en nombre illimité, qui en font les frais. — Pour être reçu fondateur, il faut vivre de son travail PERSONNEL, être présenté par deux des premiers fondateurs, qui se portent garans de la moralité de l’ouvrier convié à notre œuvre. (Les hommes de lettres ne sont admis que comme correspondans.) Les fondateurs choisissent, chaque trimestre, ceux qui doivent faire partie du Comité de rédaction. Ont été nommés, pour le premier trimestre : MM. André MARTIN, charpentier ; Anthime CORBON, typographe ; LAMBERT, commis-négociant ; DEVAUX, typographe ; LAMBERT, cordonnier ; GARNIER, copiste ; PETIT-GERARD, dessinateur en industrie ; DELORME, tailleur ; GARNOT, bijoutier ; VERY, menuisier ; LEHERICHER, teneur de livres ; GAILLARD, fondeur ; CHAVENT, typographe ; BELIN, tailleur ; VARIN, ouvrier en produits chimiques, membres du Comité de rédaction. »

Le programme de l’Atelier, sa déclaration, qu’il appelait « Introduction, » tant ses auteurs apercevaient leur ouvrage dans son ensemble, expose nettement son sujet :


Le journal dont nous livrons aujourd’hui le premier numéro au public est adressé aux ouvriers par des ouvriers. En prenant la plume, nous ne quittons point l’atelier ; nous resterons ce que nous avons été jusqu’à ce moment ; partageant les sentimens et les labeurs de ceux auxquels et pour lesquels nous allons parler, imbus des mêmes espérances, stimulés par les mêmes misères ; en un mot, toujours placés de telle sorte que nous ne puissions rien oublier de ce que nous avons appris, ni laisser aucun doute sur nos intentions et sur notre but.

Jusqu’à ce jour, les classes ouvrières ont été défendues par des gens qui tous étaient étrangers. En conséquence, on a pu dire aux uns qu’ils ne soutenaient notre cause qu’afin de faire de nous un instrument politique destiné à être brisé aussitôt qu’il cesserait d’être utile à leur fortune ; à d’autres on a dit qu’ils traitaient une question qu’ils ne connaissaient pas. En un mot, aux uns on objectait l’ambition, aux autres l’ignorance. Rien de pareil ne pourra être opposé à un journal tel que le nôtre. Nul de nous,