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Elles y trouvent des vertus, et puis l’énoncé de ce qui ne doit pas être mis en discussion. Ici, l’individu sent s’éveiller en soi des parties profondes auxquelles ailleurs rien ne parle si fort. Qu’un cantique s’élève à l’autel, un autre chant surgit dans nos cœurs.

La scène qui vient de se dérouler sous mes yeux donne une réplique à la demande que bien souvent je me suis posée : « Hautes églises de France, que pensez-vous faire ? Dans votre péril, au milieu de tant de bassesse, d’ignorance et de haine, et quand l’ennemi brisant nos efforts donne l’assaut à nos murailles, quels moyens réservez-vous ? » La vieille cathédrale me répond : « Je formerai les petits enfans. »


XVII
LA MOBILISATION DU DIVIN

Accroupis de Vendôme, épicier de Bornel, Triboulets de Grisy, blackboulés de Moulins-les-Noyers, depuis trois ans que je vous observe, je ne m’explique pas comment vous pouvez vivre. C’est entendu, vous êtes les fils de la femme, vous buvez, mangez, respirez, mais avec quel ensemble plus vaste que votre individu êtes-vous rattachés ? Quelles idées accueillez-vous ? Quelles émotions gonflent votre cœur ? Quel feu avez-vous reçu pour le transmettre dans la course des torches ? De quelle communion vous réclamez-vous ?

Je sais qu’il est d’autres fontaines que le christianisme. M. Gérard-Varet me l’a dit à la tribune de la Chambre : « Vous voulez savoir de quoi nous vivons ? Nous servons les dieux de la Grèce. » Soit ! mais vous, Triboulets de Grisy, Bornel, Vendôme et autres lieux, n’essayez pas de me raconter que vous voulez abolir le culte du Christ parce que vous savez une meilleure culture de l’âme. Votre indécence tout animale autour de ces hautes demeures de l’idée, vos cris inarticulés, votre incapacité à nommer dignement, à définir les choses que vous haïssez, révèlent que vous êtes exclus du bénéfice de toute civilisation. De quoi peut se nourrir votre désir, votre esprit, votre âme ? De rien, elle est quasi toute morte. Vous êtes privés, vidés de ce qui constitue l’humanité. En dépit de votre assurance et des pièces de cent sous que vous faites sonner dans