Rien ne restera plus des chrétiens en Afrique,
Que ceux jetés dans les silos ;
L’Émir, lion de Dieu, Hiba le magnifique,
Aura leurs princes pour féaux,
Et sans que l’étranger désormais la profane,
Secouant au vent son sommeil,
De la Mecque à Tanger, la terre musulmane
Resplendira dans le soleil.
Vendredis de l’Islam, jours des paresses sages,
Beaux loisirs parfumés de prière et d’encens :
L’air a plus de langueur, et plus lents, les nuages
Filent leur blanche laine à des fuseaux luisans.
Rabat sourit, heureuse, en sa robe éclatante ;
Il est midi : bientôt l’appel des muezzins
Répondant au souhait d’une pieuse attente
Va faire résonner les créneaux sarrasins.
Allégresse des yeux, là-bas, le ciel bleu pâle
Se fond dans l’Océan, aussi pâle que lui,
Et l’eau lointaine, en cette union idéale,
Devient de la clarté qui tremble et qui séduit.
Devant le Bou-Regreg et son large estuaire,
La Barre lance encor des escadrons d’argent,
Qui, cabrés l’un sur l’autre, emplis d’un sourd tonnerre,
Vont à l’assaut avec un panache changeant.
Mais la paix de la ville errante par l’espace
Incline la pensée aux bonheurs indolens,
Rend le pas indécis, et, sur chaque terrasse,
Côte à côte assoupit les ramiers turbulens.
Rabat, « Ribat el Fath, » le camp de la victoire,
Orgueil du grand Chérif Yacoub el Mansour,
Au soleil printanier qui caresse sa gloire,
Rêve sous sa Kasbah et songe sous sa Tour.