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pluviaire essentiellement continu et qui d’une manière incessante a écroûté sans arrêt la superficie du pays. La coulée de Jussat, conservée au sommet de Gergovie, nous permet de revoir l’épiderme terrestre aux commencemens de l’époque quaternaire ; et l’on est frappé de l’abaissement général du pays entre ce moment-là et l’époque où s’est écoulée la nappe de la Cère, à partir du puy de Nadaillat jusqu’au Cret. L’érosion se continuant, la lave de Gravenoire s’est écoulée dans des fonds de vallée bien plus bas, et cette lave n’a été suivie de celle du Pariou, qu’après une nouvelle usure pluviaire de toute la région.

Or, la pluie seule a soustrait dans l’intervalle que nous considérons des centaines de mètres d’épaisseur à toute la région, et le fait est d’autant plus digne de remarque que le relief accentué du pays devait donner une part plus large aux phénomènes de rabotage aqueux dans la sculpture du sol.

Cet enseignement décisif que nous donne le pays d’Auvergne, nous l’appliquerons à des pays plus tranquilles, à la région parisienne par exemple, et ce ne sera pas l’un des moindres argumens pour attribuer à notre Plateau Central une importance scientifique incomparable. La vallée de la Seine n’a nulle part une profondeur analogue à celle qui concerne la région des Puys. Dès lors, nulle objection de principe ne se présente, lorsqu’on se demande si le ruissellement de la pluie n’est pas, dans le Nord de la France, comme dans son Massif Central, le seul artisan du modelé des terrains.

Quand on remonte une rivière dans toute sa longueur jusqu’à sa source, on reconnaît que sa vallée présente d’un bout à l’autre les mêmes caractères morphologiques. Il en résulte qu’il n’y a aucunement motif de faire intervenir des modes de creusement différens pour les diverses régions et que les inégalités de dimension de celles-ci peuvent s’expliquer par les durées plus ou moins prolongées de réactions identiques. Si l’on est près de la source ou dans le haut de n’importe quel sillon d’affluent, on reconnaît que le vallon, — plus bas si net et contenant le cours d’eau, — passe, par des transitions insensibles, à un simple petit sillon tout pareil à ceux que la pluie dessine sur un sol préalablement aplani. Les notions maintenant acquises sur la régression des cours d’eau et la capture des rivières, permettant d’affirmer que ce petit sillon s’élargira et s’approfondira avec le temps, pour prendre tous les caractères des tronçons de vallons