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qu’elle soit localisée. » Mot de bon sens, s’il en fut. Car qui dit expérience, dit précisément application provisoire de mesures dont on n’a pas encore éprouvé les résultats. L’imposer partout et d’un seul coup, c’est faire comme un général qui engagerait toutes ses forces à la fois sur un point encore douteux et sans se ménager une ligne de retraite.

On créait quatre types d’enseignement. Soit ! puisqu’on était généralement d’accord que l’enseignement classique devait plutôt gagner en qualité qu’en quantité. A tout le moins, pour que chacun de ces quatre types fût vivant, devait-on les constituer tous sur le modèle de la vie. Dans le serpent, tout rampe ; dans l’oiseau, tout vole ; dans le tigre et dans le lion, tout griffe et tout mord. Autrement dit, il n’y a pas d’organisme qui, dès le début, n’ait des connexions, des ajustemens, un mode de développement voulu par le caractère dominant du type et en harmonie avec sa destination. Il eût donc fallu que chacun de ces types d’enseignement eût son personnel, adapté à ses exigences, dévoué à son service, attentif à tout ce qui serait de nature à le perfectionner. Parmi les moyens de réussir venait en première ligue la liberté d’enseignement, la vraie, sans tracasseries et sans traquenards, sans ruses hypocrites et terrorisantes. Alors maîtres et élèves faits les uns pour les autres se seraient rencontrés à l’appel et sous l’égide des grands groupes sociaux, des aristocraties industrielles ou commerciales, des autorités régionales. L’Etat, avec ses ressources précieuses à conserver, aurait créé à ses frais des expériences plus limitées, mais qu’il aurait toujours eu les moyens de corriger et de perfectionner. De cette manière, il n’aurait pas touché à tout avec les mêmes mains, mais il eût tout aidé et tout contrôlé.

Revenons à l’Université elle-même. Pourquoi n’a-t-elle tenu aucun compte des avis d’hommes aussi bien faits, à tout point de vue, pour être écoutés d’elle, que MM. Berthelot et Bréal ? L’un et l’autre s’entendaient pour lui recommander instamment, et presque dans les mêmes termes, des maisons, des méthodes, des catégories de professeurs distinctes. Ils la conjuraient d’avoir moins de lycées surpeuplés, plus de lycées autonomes et plus de lycées différens pour les différens genres d’études. Ils auraient pu citer l’exemple de la Prusse qui a fondé chez elle deux lycées exclusivement français, dont un à Berlin. Si on voulait que ce fût le collège qui formât de toutes pièces de