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faire le reste, — pour supprimer toute liberté d’enseignement. Les coups portés par eux à leurs concurrens, qu’ils appellent si souvent leurs ennemis, ne leur ont en rien profité. La discorde et la panique ont gagné leurs propres troupes, qui tirent les unes sur les autres.


Le problème à résoudre était-il donc si difficile ? Difficile » oui, assurément, comme tout ce qui doit servir à former ou à réformer et à conduire des êtres humains ; mais enfin, essayons de trouver les données essentielles et de les voir telles quelles sont.

Qu’est-ce que les générations avancées déjà dans la carrière doivent et devront de plus en plus aux générations appelées par elles à la vie ? Avant tout, les moyens de subsister par l’exercice bien compris d’une profession suffisamment lucrative. Les démocraties antiques ont essayé de se reposer sur leurs esclaves du souci du travail matériel. Inutile de rappeler qu’aujourd’hui, comme, au reste, depuis des siècles, le peuple, — souverain ou non, — doit gagner sa vie lui-même.

Quand l’asile paternel était stable, quand les enfans se savaient inscrits d’avance dans une profession où tout était réglé, l’instruction se réduisait presque toute à l’apprentissage et à la pratique des métiers. Les traditions oralement transmises achevaient de former l’homme, de l’adapter à son milieu, de le diriger dans les luttes collectives. Elles l’aidaient dans les momens de misère, malheureusement trop accrus par les inconvéniens, par les excès surtout de la localisation des efforts, de la localisation des différens genres de production et des différens genres de commerce. Depuis plus de cent ans, toute recherche de travail, tout essai d’amélioration, sont devenus, comme chacun sait, individualistes ; c’est à peine si, depuis quelques années, nous entrevoyons un retour à l’esprit d’association et à un régime de travail organisé. Le champ de l’industrie s’est, il est vrai, considérablement étendu ; mais en même temps tout s’y divise et s’y subdivise, tout s’y renouvelle indéfiniment. Les difficultés sont donc en quelque façon toujours renaissantes. Quelques esprits enthousiastes de la science ont pu croire, à plusieurs reprises et à l’exemple de Descartes, que les forces de la nature vaincue et domestiquée remplaceraient l’esclavage et