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J’avançais dans ces beaux jardins
Dont l’opulence nonchalante
Semble descendre avec dédain
Sur les passantes indolentes.

L’ardeur des arbres à parfums
Flamboyait, dense et clandestine ;
Je cherchais parmi les collines
Naxos, au nom doux et défunt.

Comme des ruches dans les plaines,
Des entassemens de citrons
Sous leurs arbres sombres et ronds
Formaient des tours de porcelaine.

Les parfums suaves, amers,
De ces citronniers aux fleurs blanches
Flottaient sur les vivaces branches
Comme la fraîcheur sur la mer.

Creusant la terre purpurine,
D’alertes ruisseaux ombragés
Semblaient les pieds aux bonds légers
De jeunes filles sarrasines !

Je me taisais, j’étais sans vœux,
Sans mémoire et sans espérance ;
Je languissais dans l’abondance.
— O pays secrets et fameux,

J’ai vu vos grâces accomplies,
Vos blancs torrens, vos temples roux.
Vos flots glissant vers l’Ionie,
Mais mon but n’était pas en vous ;

Vos nuits flambantes et précises,
Vos maisons qu’un pliant rideau
Livre au chaud caprice des brises ;
Les pas sonores des chevreaux
Sur les pavés près des églises ;