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leur tempérament énergique de rendre de réels services. Ainsi fut créée l’Armée auxiliaire. Un autre décret institua onze camps régionaux, pour instruire et concentrer les mobilisés. Un troisième décret organisa le Génie civil des Armées, pour permettre aux soldats en campagne d’avoir les moyens de développer les fortifications passagères, de réparer ou détruire les ouvrages d’art, de rendre les routes impraticables à l’ennemi. M. de Freycinet, dans la tâche gigantesque qu’il avait acceptée, tint à s’entourer de capacités, d’ingénieurs, de savans et de zélés inspecteurs, qui ne se contentaient pas seulement de la lâche assignée à leur talent, mais qui avaient souvent des initiatives hardies et heureuses. Tel M. Cuvinot qui créa l’excellent et si utile Service des Reconnaissances.

L’auteur des Souvenirs ne revient pas comme dans son livre, la Guerre en province, sur les détails des opérations des différentes armées. Il les rappelle seulement à grands traits. Il traite de l’armée de la Loire confiée à l’énergie savante, au sang-froid et à la décision du général d’Aurelle de Paladines, de la bataille de Coulmiers où fut vaincue l’armée bavaroise qui s’enfuit en désordre, laissant à nos troupes de l’artillerie et de nombreux prisonniers, puis de la reprise d’Orléans par le prince Frédéric-Charles ; de la retraite des troupes de d’Aurelle de Paladines et du général Chanzy ; de la bataille du Mans, de la campagne du Nord et de la campagne de l’Est. Le récit est sobre et émouvant. Les mérites et les fautes des généraux sont exposés avec impartialité, comme les actes eux-mêmes de la Délégation. En se défendant d’avoir voulu imposer au général d’Aurelle de Paladines des plans personnels, M. de Freycinet affirme que ce général a rempli parfaitement la partie de sa mission qui consistait à façonner et à agglomérer les nouvelles unités. « Froid, réfléchi, un peu soupçonneux, il donnait l’impression de l’obstination et de la vigueur. Une fois surmontées les hésitations du début, assez compréhensibles d’ailleurs, il avait montré des qualités maîtresses : solidité, décision, sang-froid. Sa fermeté maintenait les troupes dans une exacte discipline : grâce à lui, nous possédions une armée. » Aux objections du général qui, après Coulmiers, aurait préféré attendre l’attaque du prince Frédéric-Charles dans les positions d’Orléans qu’il avait bien étudiées et fortifiées, l’ancien délégué à la Guerre répond que rien ne prouvait que le général ennemi viendrait chercher