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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




Nous sommes en pleine crise politique et il n’y a pas lieu d’en être surpris. Quand une situation est foncièrement gâtée, on peut pendant un peu plus ou un peu moins long temps en sauver les apparences pour le grand public, habituellement mal informé, mais le mal gagne et se propage, et l’éclat final ne tarde pas à se produire. Ce qui est fatal trouve toujours le moyen d’arriver en dépit de tous les efforts qu’on fait pour l’empêcher. M. de Selves, ministre des Affaires étrangères, vient de donner sa démission : nous n’en savons pas davantage au moment où nous écrivons ; nous saurons et nous pourrons sans doute en dire un peu plus à la fin de notre chronique ; mais la suite est facile à prévoir. Le ministère se survit à lui-même. Depuis plusieurs semaines déjà des désordres mortels se sont manifestés en lui, et si l’inévitable dénouement n’a pas encore lieu, c’est seulement à cause du traité franco-allemand dont on attend la ratification par le Sénat. Aussitôt après, le ministère sera renversé. Est-ce à dire que le traité soit aussi mauvais qu’on le prétend et qu’il n’y ait aucun moyen de le défendre, sinon en lui-même, au moins dans les circonstances qui l’ont rendu nécessaire et ont atténué la responsabilité de ses auteurs ? Non ; le mal dont le ministère se meurt n’est pas dans le traité, il est en lui-même. Qui dit gouvernement dit ou devrait dire unité : le nôtre est diversité, opposition entre les parties, contrariété entre les personnes, conspiration de celui-ci contre celui-là, embûches secrètes que se tendent réciproquement des hommes qui sont pourtant embarqués sur le même radeau, enfin anarchie complète. D’après l’Écriture, toute maison divisée contre elle-même doit périr.

On sait comment l’esclandre s’est produit, au sein de la