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S’il y a eu concordance entre l’action de la plupart des instituts d’émission européens, pour relever le loyer des capitaux, il n’en a pas été de même dans la répartition de ces capitaux entre les diverses places. Des déplacemens considérables se sont produits durant la seconde quinzaine de septembre 1911 : nous en trouvons l’indice dans les mouvemens brusques du cours des changes entre plusieurs contrées. On sait que la France est un pays prêteur, et qu’en temps normal elle met des sommes assez fortes à la disposition des places étrangères, où elle profite d’un taux d’intérêt plus élevé qu’à Paris. En présence des difficultés marocaines, les banques françaises décidèrent de rapatrier la majeure partie de l’argent employé par elles à Berlin, Bruxelles, Londres, Genève et ailleurs. Leurs débiteurs sur ces diverses places durent acheter rapidement des effets sur la France afin d’acquitter leurs obligations : ceci amena une hausse générale de ces effets en Allemagne, Belgique, Angleterre, Suisse, et une baisse correspondante, à Paris, des reichsmark, des livres sterling, des francs belges et helvétiques. La cote suivante en fait foi :


Cotes des charges a Paris sur Le 31 août 1911 Le 22 sept. 1911
Londres 25,26 25,16
Berlin 123,385 122,87 1/2
Bruxelles 99,50 99,1875
Genève 99,82 99,623
Italie 99,50 99


La France a donc recouvré la disponibilité des sommes qu’elle avait temporairement employées hors de ses frontières. Une fois de plus, l’utilité de ces placemens est apparue, puisqu’en peu de jours nous avons pu rappeler à nous ces réserves, dont le retour fortifiait notre situation en affaiblissant celle de nos débiteurs, obligés de nous les restituer. Il est difficile d’en évaluer le total. Certains publicistes ont été jusqu’à parler d’un milliard que nous aurions ainsi employé sur la seule place de Berlin. Ce chiffre nous paraît exagéré : nous croyons qu’en 1910 il s’était employé en Allemagne plus d’un demi-milliard d’argent français, mais qu’au début de 1911, cette somme était réduite à 400 millions de francs environ. A Vienne, l’écart des taux durant le premier semestre de 1911 n’avait pas été assez considérable pour attirer en Autriche des sommes bien