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solidarité telle entre les diverses places du monde, que rien de ce qui touche l’une ne saurait laisser les autres tout à fait indemnes ; la question est de savoir jusqu’à quel point les unes ou les autres peuvent résister au courant ou doivent être entraînées.

C’est au milieu d’août que Paris commença à s’inquiéter sérieusement des nouvelles qui lui venaient de New-York et aussi de Berlin. Toutefois, la liquidation d’août se passa encore bien et n’infligea pas de pertes sensibles aux acheteurs engagés à la hausse. Mais, en septembre, l’horizon se rembrunit et les places françaises ne purent rester indifférentes à ce qui se passait ailleurs. A la fin du mois, la baisse des actions de sociétés cuprifères entraîna le reste du marché : le cuivre était descendu, en peu de semaines, de 2 000 à 1 750 francs la tonne ; vers le 15 octobre, le cours du métal rouge était tombé à 1 500 francs.

Toute la cote de Paris fléchit alors ; mais, contrairement à ce qui se passait en Amérique à la même heure, les capitaux étaient abondans et s’offraient à bon marché aux spéculateurs désireux de se faire consentir des avances sur leurs titres. Il en fut de moine à la fin du mois d’octobre ; l’aisance monétaire de la France contrastait avec le désarroi de l’Amérique. Au début de novembre cependant, la Manque de France dut élever son taux d’escompte de 3 1/2 à 4 pour 100 : ce dernier taux était encore bien faible en comparaison, non seulement de ceux de New-York, qui, à la rigueur, eussent pu ne pas avoir de contre-coup direct chez nous, mais de Berlin et de Londres. En peu de jours, la Banque de l’Etat russe éleva son taux de 7 à 7 1/2 pour 100, se mettant ainsi au niveau de la Banque de l’Empire allemand. La Banque de France, suivant une politique singulièrement élevée et prévoyante, n’hésita pas à venir en aide à la place de Londres, en escomptant du papier anglais et en le payant en or ; à son bilan du 14 novembre, nous trouvons un portefeuille d’effets sur l’étranger atteignant 81 millions de francs. La Banque de Norvège passait à 6, celles de Suède et de Danemark à 6 1/2, celle de Roumanie à 8 pour 100. L’Empire d’Allemagne plaçait à l’étranger des bons du Trésor au taux de 6 1/4 pour 100. La liquidation de mi-décembre à la Bourse de Paris fut difficile : le taux des reports y atteignit 7 pour 100. Il semble que la marche du loyer des capitaux, pendant le dernier trimestre de l’année 1907, ait été en France l’inverse de ce qu’elle fut en Amérique. Là-bas la