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1 400 francs ; « trois ou quatre actions de cette nature, écrivait-il, persuaderont mieux que toute autre chose. »

Puis, ce furent des difficultés d’un autre ordre : les chevaux barbes, achetés en Provence ou en Afrique, furent trouvés trop petits par les Normands ; aux grandes foires, l’affluence des jeunes bêtes rencontra très peu d’amateurs : « j’appréhende que cela ne refroidisse les éleveurs, disait Garsault ; avec les rudes chemins de cette province, les chevaux de médiocre taille sont ruinés en peu de temps. » À la suite d’achats faits en Flandre et ailleurs, ce sont les paysans bretons qui trouvent les étalons de l’État trop grands pour leurs petites cavales et hésitent à les leur conduire. C’était alors en Bretagne que les haras étaient les plus abondans, quoique la production chevaline n’y atteignit pas à cette époque au cinquième de ce qu’elle est aujourd’hui.

Il avait été déjà distribué 500 étalons en 1670 : ce chiffre s’élevait à 1636, au dire de Savary, à la fin du XVIIe siècle, et l’on estimait à 60 000 les poulains qui naissaient annuellement dans le royaume ; on ne s’expliquerait donc pas, si l’on ne savait combien il faut se délier des statistiques de jadis, l’impopularité dans laquelle était tombé le régime des haras que l’on accusait d’avoir causé la pénurie des chevaux. La France, disait-on, avait été contrainte d’en faire venir de l’étranger pour 350 millions de francs pendant les guerres de 1688 à 1700.

Les saillies, payées librement ; 5 francs au XVIe siècle, n’étaient guère plus coûteuses au XVIIIe par des étalons de l’État, tarifés à 8 et 10 francs ; seulement le monopole des garde-étalons semblait vexatoire. Leur traitement différait beaucoup suivant les régions : en Languedoc, une taxe annuelle de 350 francs était imposée au propriétaire chez qui les États provinciaux plaçaient un reproducteur ; en Auvergne, au contraire, ce gardien recevait un fixe de 160 francs, sans préjudice des droits sur la monte. Les propriétaires, depuis 1717, n’étaient plus libres de conduire leurs poulinières à l’étalon de leur choix. Les inspecteurs attribuaient chaque jument à un étalon déterminé et, si on ne la présentait à aucun, le prix du saut n’en était pas moins dû.

Partout, au moment de la Révolution, l’opinion publique était si hostile au régime prohibitif des haras, que l’Assemblée nationale s’empressa de l’abolir en 1700. N’empêche qu’au bout de dix ans, à l’aurore du Consulat, par une contradiction assez ordinaire, dans l’histoire, les mêmes districts qui avaient