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que la zone espagnole versera annuellement à la zone française une ristourne de 500 000 pesetas hassani. Cette ristourne sera pour une part forfaitaire et pour une part révisable dès que, grâce à la construction des chemins de fer, les lettres de voiture permettront de connaître exactement la destination définitive des marchandises importées. Quant à la question du chemin de fer Tanger-Fez, si étroitement liée à celle des douanes, elle a été réglée par la constitution d’une compagnie unique franco-espagnole (60 pour 100 à la France, 40 pour 100 à l’Espagne) qui sera seule chargée de la construction. Une fois la construction achevée, l’Espagne pourra racheter l’exploitation du secteur compris dans sa zone.

Un accord aussi vaste, aussi complexe, aussi détaillé, est difficile à juger à sa simple lecture. L’expérience seulement nous apprendra ce qu’il vaut. Il vaudra d’ailleurs ce qu’on voudra qu’il vaille. En effet, lorsqu’on revit cette longue négociation et celles qui l’ont précédée, on n’échappe pas à l’impression que toute cette affaire franco-espagnole aurait pu être menée des deux parts de façon plus simple et plus coulante. Faut-il s’étonner qu’elle ait été tant de fois troublée par le venin des partis pris, des suspicions et des rancunes ? Non ; car cela se passait entre Latins à l’imagination vive et qui ont coutume de mettre le sentiment là où ce n’est point sa place. Souvent aussi, faute de vues d’ensemble, les deux gouvernemens ont emboîté le pas à des agens locaux, dont le zèle patriotique appréciait trop peu la communauté des intérêts généraux et l’obligation des transactions. S’il fallait réviser les griefs, on trouverait sans doute que, dans ces excès de zèle, les agens espagnols ont été plus loin que les nôtres. Mais comment nier d’autre part que le gouvernement français de 1909, en excluant l’Espagne de la négociation avec l’Allemagne, en laissant ensuite par système ou par négligence traîner toutes les négociations franco-espagnoles, financières ou autres, relatives au Maroc, s’était mal inspiré des accords initiaux et avait diminué le crédit qui lui était nécessaire à Madrid pour obtenir du gouvernement royal les procédés du bon voisinage ?

Tout cela appartient au passé, et le vœu de tous est que le souvenir s’en efface à jamais. Ce n’est point le hasard, mais la nature des choses qui a dicté à la France et à l’Espagne leur collaboration marocaine. C’est la nature des choses et le bien