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diverses tentatives faites pour prévenir la peste chez les sujets sains exposés à la contagion.

On a d’abord pensé à une méthode que, par analogie avec la variolisation, on pourrait appeler la pestisation. L’idée, émise par Wesprani en 1755 et Samoïlowitz en 1781, fut réalisée, en 1803, à Constantinople, par Valli, qui inocula vingt-quatre personnes avec un mélange de pus pesteux et de lymphe variolique (qu’il pensait de nature à atténuer la virulence de la peste) ; Sola à Tanger, en 1818, inocula du virus pesteux associé à de l’huile : enfin, en 1824, Ceruti, en Egypte, inocula la peste à six personnes : cinq moururent. On renonça au moyen (comme on avait renoncé à la variolisation).

Quand Yersin découvrit, en 1894, à Hong-Kong, le microbe de la peste, Roux, Calmette et Borel firent, en 1895, à l’Institut Pasteur, avec les premières cultures de ce microbe, des essais de vaccination sur les animaux de laboratoire.

En employant des cultures, tuées par un chauffage à 60°, ils réussirent à vacciner des animaux et constatèrent que le sérum de ces animaux jouissait de propriétés préventives et curatives dans l’infection pesteuse expérimentale. Des lors, les chevaux furent immunisés pour fournir le sérum nécessaire au traitement de la peste humaine. Voilà un premier moyen de vacciner l’homme contre la peste : la sérothérapie préventive. On a aussi préparé des vaccins par atténuation du virus, soit en chauffant les cultures (Haffkine 1897-1900), soit en traitant les corps microbiens par des substances chimiques (Zuwig et Galeotti 1897), soit en faisant vieillir les cultures (Yersin 1900), soit en combinant divers procédés d’atténuation (Kolle, Otto, Hetsch, Strong, 1903-1907).

Ce vaccin n’agit que lentement : l’animal n’est immunisé qu’après un temps qui varie de quatre à douze jours ; pendant cette période, le sujet vacciné est même plus sensible qu’à l’état normal à l’inoculation pesteuse. Alors on combine les deux méthodes (sérovaccination Calmette et Salimbeni) : on mélange une petite quantité de sérum antipesteux aux cultures tuées ; de cette façon, l’immunité conférée par le sérum met le vacciné, pendant cette période dangereuse, à l’abri d’une atteinte de peste possible. C’est le procédé à employer, en plein foyer pesteux, ou dans un pays où la peste est à l’état endémique comme l’Inde et le Brésil en fournissent l’exemple.