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sensible), puis successivement à des doses graduellement plus fortes. On immunise ainsi le cheval contre la diphtérie, tout en évitant de le rendre trop malade. Quand le cheval est ainsi préparé, le sérum de son sang contient en grande ; quantité l’antitoxine diphtérique c’est-à-dire l’anticorps ou l’antidote de l’antigène diphtérique. On saigne alors le cheval : on prend vingt à vingt-cinq litres de sang (ce qui correspond à douze litres de sérum) ou bien on fait une série de saignées plus faibles (six litres) avec de nouvelles injections. Le sérum ainsi préparé, injecté à l’homme diphtérique à la dose de dix ou vingt centimètres cubes, suivant une technique que tous les médecins connaissent très bien aujourd’hui, a des effets curatifs merveilleux.

Depuis 1804, la mortalité ! au pavillon de la diphtérie à l’hôpital des Enfans Malades, est tombée de 51,11 à 8,9 en moyenne, pour 100 ; et, dans ces villes de France où nous avons vu la diphtérie causer 6 à 7 000 décès dans un an avant 1894, elle n’en produit plus que de 1 500 à 2 000. On peut aussi (et c’est le côté qui nous intéressé ici) employer ce sérum antidiphtérique pour un but prophylactique, c’est-à-dire l’injecter à un individu sain pour l’empêcher de contracter la diphtérie.

Dès 1894, on fit des injections préventives. Cette pratique fut ensuite discutée après quelques accidens, mais, depuis lors, après des études approfondies, la question a été parfaitement mise au point et, le 28 avril 1902, l’Académie de médecine a voté les propositions suivantes que tout le grand public doit bien connaître :

1° Les injections préventives de sérum, à la dose de cinq ou au plus dix centimètres cubes, ont une action manifeste ; elles produisent l’immunisation chez les enfans exposés à contracter la diphtérie. Elles n’ont jamais donné lieu à des accidens sérieux et produisent tout au plus, dans un certain nombre de cas, des éruptions passagères, plus rarement encore quelques douleurs articulaires. Malheureusement, la période d’immunisation n’a qu’une durée peu prolongée, trois ou quatre semaines au plus. Dans des cas rares, malgré l’injection, la diphtérie est survenue ; elle était particulièrement bénigne.

2° Les injections de sérum sont particulièrement indiquées dans les familles où s’est développé un cas de diphtérie, pour préserver de la contagion les autres enfans.