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connaissance du juriste Samwer et du publiciste Roggenbach qui prirent une part importante aux luttes pour la constitution de l’unité allemande et eurent sur la carrière du jeune diplomate une influence décisive. Robert Morier se lia également avec le baron de Stockmar qui lui témoigna une fidèle et profonde amitié. En octobre 1860, Morier mandait à lord John Russell que l’alliance anglo-prussienne était fort difficile à conclure, en raison de la faiblesse ou de l’ignorance des ministres de l’Angleterre et de l’hostilité de l’opinion publique allemande contre tout ce qui était anglais. Morier attachait le plus grand prix à cette alliance, car il rêvait d’unir l’Angleterre libérale à la Prusse libérale, partageant à cet égard les idées de son ami le baron de Stockmar[1].

En mars 1865, Morier fut envoyé, à Vienne, comme second secrétaire d’ambassade et commissaire anglais pour signer une convention commerciale avec l’Autriche. Dans le courant de septembre de la même année, il remplit les fonctions de secrétaire de légation à Athènes et, le 30 décembre, il fut transféré, avec le même titre, à Francfort-sur-le-Mein. En 1863, il suivit de près la grave affaire du Schlesvig-Holstein et en relata les curieuses phases dans un journal anglais. C’est à ce moment qu’il accentua sa liaison avec François de Roggenbach, lequel lui fit connaître le prince royal dont il conquit bientôt l’amitié. En juillet 1866, Morier retourna à Vienne négocier un nouveau traité de commerce, puis revint à Francfort et de là à Darmstadt, dont il dirigea la légation. Le 8 juillet 1871, il passa à la légation de Stuttgart, puis à celle de Munich le 30 janvier 1872, et se rendit en 1876 à Lisbonne comme ministre plénipotentiaire. En 1881, il fut nommé ambassadeur à Madrid, puis en 1884 à Saint-Pétersbourg. Là, il fit preuve d’une habileté exceptionnelle dans les relations de l’Angleterre avec la Russie, spécialement au sujet de l’incident du Pendjab, et il contribua fortement au maintien de la paix entre les deux pays.

Durant trente-trois années de diplomatie active, il avait acquis des connaissances variées et une expérience qui furent employées utilement par lui au service de sa patrie. Il n’était

  1. Ernest-Alfred-Christian de Stockmar, jurisconsulte et historien des plus estimés (1823-1886), était le fils du célèbre baron Christian-Frédéric de Stockmar, homme d’État allemand, ami du roi Léopold, conseiller très habile et très sage de la reine Victoria et du prince Albert.