Page:Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 11.djvu/352

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Les personnes qui craignent que leur fin ne soit hâtée par celle du système solaire peuvent donc se rassurer.

Le cortège du soleil une fois disparu, cela veut-il dire que d’autres systèmes analogues et lointains, et peut-être saupoudrés de-ci de-là d’une poussière pensante analogue à nous, n’existeront pas indéfiniment ? C’est une question fort débattue dans les récentes disputes sur l’énergétique, et qu’il ne nous est point loisible de traiter aujourd’hui.



La question de la figure des astres, qui se ramène à l’étude de l’équilibre d’une masse fluide soumise à diverses influences, est après le problème des n corps, la partie la plus importante de la Mécanique céleste. Dans ce domaine, Poincaré a fait des découvertes remarquables ; elles marquent, comme l’a observé sir Georges Darwin, le jour où il remit à leur auteur la médaille d’or de la société Royale de Londres, « une époque dans l’étude du sujet. » On ne connaissait auparavant que deux figures d’équilibre d’une masse fluide en rotation, l’ellipsoïde de révolution et l’ellipsoïde à trois axes inégaux de Jacobi. Poincaré en a découvert par le calcul une infinité d’autres dont l’une est stable et a un peu la forme d’une poire ; d’où le nom d’ « apioïdes » donné à cette nouvelle classe de corps. En fait, les figures piriformes découvertes par Poincaré paraissent jouer un grand rôle dans la nature, comme le prouve l’étude des nébuleuses et de certaines étoiles doubles serrées. Elles nous permettent de concevoir le mécanisme de la bipartition, assez analogue à celle des cellules organiques, qui a pu donner naissance à un grand nombre de systèmes binaires, séparer successivement la terre du soleil, puis la lune de la terre.

Enfin, dans une étude connexe, Poincaré a montré qu’aucune forme d’équilibre stable n’est possible si la vitesse de rotation dépasse une certaine limite, et il applique immédiatement ce principe à l’étude de cette énigmatique merveille que sont les anneaux de Saturne. Maxwell avait démontré que les anneaux ne peuvent être solides, et que, s’ils sont fluides, leur densité ne peut dépasser les 3/100 de celle de la planète. Poincaré établit alors que, si les anneaux sont fluides, ils ne peuvent être stables que si leur densité est supérieure au seizième de celle de Saturne, et il en conclut que la seule alternative possible est